LA REALISATION D'UN DICTIONNAIRE
par Jean Edouard AYVASIAN auteur du "Dictionnaire Moderne  FRANCAIS-ARMENIEN"
79 rue de Strasbourg - 92400 Courbevoie Tél/fax +33(0)1 43 33 65 58

Le dictionnaire est l’outil qui au moment de sa conception et sa diffusion est l’image que nous avons de la langue. Il est le reflet de sa richesse et sa modernité.

 

C’est par lui que la langue prouve son existence, sa vitalité, sa richesse terminologique. Il peut se présenter sous diverses formes : linguistiques, encyclopédique, glossaire, technique ou professionnelle.

 

Plus ces dictionnaires sont nombreux et divers plus cette langue est riche et moderne.

 

La réalisation d’un Dictionnaire :

 

pour concevoir un dictionnaire il faut :

 

-           recueillir les mots, en chercher les sens, les significations, les utilisations, l’épurer des sens obsolètes, y ajouter les nouvelles utilisations et sens élargis,

-                      y insérer les termes universalisés ou trouver leurs équivalents,

-                      faire la lecture des ouvrages existants et la fusion des données utiles en une base unique,

-                      faire la fusion de mots et termes divers en un vocabulaire centralisé et appliquer la modernisation dans ses formes grammaticale, orthographique, phonétique, lexicale.

 

C’est un travail de longue durée qui demande une grande et patiente préparation des données qui vont servir à rédiger l’ouvrage.

 

Les dictionnaires arméniens existants :

 

Les dictionnaires que nous avons consultés étaient anciens et comportaient de nombreux mots dont la signification avait évolué sinon, parfois, cessé d’avoir cours.

Ces ouvrages doivent évoluer au même rythme que la langue et, pour cela, exigent des mises à jour périodiques.

 

Ce sont souvent des ouvrages rédigés et édités par une Diaspora dont la langue française n'est qu'une troisième langue après l’arménien et la langue du pays dans lequel ils sont réalisés.

 

Certaines rééditions de ces ouvrages, parfois mises en vente sous une nouvelle couverture, sans changement ou presque, sans enrichissement, sans révision de la base de données, ressemblent étrangement à un plat réchauffé plusieurs fois sans goût et sans saveur.

 

Nous avons relevé également que l’utilisation des mots tout autant que la formulation (la rédaction) de la phrase se fait selon une locution et une syntaxe qui est propre au pays du rédacteur mais rarement dans une syntaxe ou une phraséologie parfaitement française.

 

Il faut ajouter encore, sans vouloir être sévère par plaisir, que nous y trouvons également des mots qui, n’étant pas compris ou connus par le rédacteur du dictionnaire, sont tout simplement interprétés à partir du sens de chacune des racines latine et/ou grecque qui le compose.

 

C’est ainsi que certains auteurs ont travaillé à partir du Larousse (dans lequel nous trouvons très souvent l’étymologie du mot), et cette façon d’agir a généré des erreurs importantes et altéré la qualité et la valeur du travail réalisé.

 

Nous y avons relevé des traductions qui ne pourraient servir de références linguistiques. Le sens de la traduction ne correspondant pas du tout au mot courant utilisé pourtant depuis plus de 50 ans.

 

Nous avons même vu que, faute de connaître la traduction arménienne du mot, l’auteur nous a donné des néologies de son invention, que lui seul comprend.

 

Il y a quelquefois eu abus de néologies, inventées pour la circonstance, qui ternissent et brouillent la clarté que devrait dégager un semblable ouvrage.

 

L’on dit avec justesse que pour avoir du bon pain, mieux vaut le donner à faire au boulanger et le payer un pain de plus car cela évitera bien des regrets tardifs.

 

Les dictionnaires Francais-Arménien et Arménien-Français :

 

En France vous trouverez en vente plus de dictionnaires Arménien-Français que l’inverse pour diverses raisons dont principalement celles développées plus haut.

 

Le besoin d’un dictionnaire Francais-Arménien de qualité était grand et son urgence évidente. Voilà pourquoi il a été conçu en priorité.

 

Le seconde raison est plus prosaïque mais combien réelle. Je ne le ferais peut être pas aussi bien que ce premier pour des raisons qui sont évoquées dans un petit exposé que j’ai rédigé sur les écritures arméniennes.

 

Pourtant :

 

Imaginez que nous ayons à faire un exposé, en arménien, sur la technologie actuelle et son utilisation, sans oublier de parler de l’ordinateur et de ses différents composants. Je reconnais ne pas être capable de le mener à bout sans faire appel à des termes universels ou des désignations standardisées par leurs intégrations dans un vocabulaire technique élargi (marque, logo, contractions et sigles) ou encore par l'emprunt de mots étrangers.

 

Nous ressentons très fortement le manque de ces mots nouveaux, qui généralement naissent toujours  avec les nouvelles sciences ou les nouvelles technologies.

Si nous ajoutons, à cela, l'absence d’information sur ceux existants ou peu usités, et l'extinction dans notre diaspora de cette sphère active de gens cultivés, utilisateurs avides de la langue, diffusant en continu par une utilisation intensive ces mots nouveaux, nous mesurons l'urgence du travail de revitalisation de la langue.

 

Parallèlement et complémentaire il faut encore ajouter le travail d'enrichissement de la langue que faisait le personnel de l’édition et autres parutions (périodiques, journaux) qui alors, en pleine activité, bourdonnaient comme des ruches.

 

Nous restons aujourd'hui sur notre désir et une soif de savoir et d'apprendre. Voilà où se situe la richesse et la modernité linguistique manquante dont nous  allons parler.

 

Il n’est plus possible, désormais, de se cantonner dans une seule et unique forme d’expression linguistique. Il faut éviter la création artificielle de tendances Mesropienne et Abériane (sous-entendu occidentale et orientale) qui divisent et affaiblissent encore plus notre Diaspora.

 

C’est pourtant ce que prêchent certains adeptes d’une forme de parler qu’ils nomment Mesropienne voulant ainsi authentifier par cette appellation la primauté de la forme d'expression qu’ils défendent. Nous savons pourtant que l’on nomme  Mesropienne l’écriture Grabar, celle de Mashtots, (nommée également Ecriture Liturgique ou encore  Latin Arménien) et non une forme locale d'expression.

 

Ces personnes veulent, sous cette désignation, glorifier et imposer une forme d'expression qui  a évoluée pour devenir, avec le temps et les siècles écoulés, plus particulièrement celle usitée dans la diaspora Syro-Libanaise, zone anciennement délimitée dans le patriarcat d'Antioche, dont ils se croient défenseurs et gestionnaires.

 

Cette forme d'expression découle en réalité, comme toutes les autres formes d'expressions arméniennes actuellement en usage, de l'Arménien de Cilicie base linguistique en utilisation commune dans le Patriarcat d'Antioche, le Comté d'Edesse et la Petite Arménie (l'Arménie de Cilicie).

 

Nous reconnaissons qu’ils veulent ainsi protéger une forme d'arménien occidental que nous respectons et aimons tout autant qu’eux; mais pas au prix du rejet des autres formes d'expression.

 

Nous voulons tous améliorer notre parlé arménien et désormais ces « emprunts » ne sont plus grecs, syriens, partes ou romains mais Arménien d'Anatolie, ou Arménien Abérian (oriental).

 

Enfin de là à faire la guerre à des mots qui déjà existent et sont en utilisation, donc ayant  acquis le droit d’être testé en usage élargi pour vivre et évoluer, sachant par expérience que rien ne se fait par la force et que seul l'intégration par l'usage ou le rejet déterminera la pérennité du mot, il y a un pas qu’il ne faudrait pas franchir !

 

Qui est capable de dire combien de mots rejetés, pour ceux restants que nous connaissons, des innombrables créations et propositions avancées depuis 15 siècles ?

 

Nous devons apprendre à interpréter, comprendre, assimiler, transformer, inventer lorsque nous le pouvons mais ne devons jamais subir ni accepter l’influence que certains esprits grincheux voudraient avoir sur notre vocabulaire et notre patrimoine linguistique.

 

Patrimoine: Voilà le mot clé de ces réflexions. Nous devons sans distinction prendre et lui donner tout ce qui est bon et utile, d’où que cela vienne, si cela est pour enrichir et élargir le savoir et la connaissance; sans tomber dans un excès de protectionnisme mal placé.

 

Voilà les motivations qui m’ont donné la force de mener à bonne fin, après six longues années de peine, le travail sur ce dictionnaire.

 

Je crois qu'il faut prendre les mots là où nous les trouvons, sans présélection, dans et avec l’orthographe de la langue qui les a créés et par laquelle ils vivent.

 

Ajoutons que nous constatons, un flux continu, de venue en France de compatriotes d’expression "non Mesropienne". Ceux qui sont classés "d’expression Aberiane", nos compatriotes d’Arménie, dont la langue est l’Arménien Oriental.

 

Que faire ? Que dire ?  Nier leur existence alors qu’ils apportent un sang nouveau de la même façon que nos ancêtres allaient en chercher dans les peuplades qu’ils colonisaient et faisait migrer chez eux ? Cette fois pourtant ce ne sont plus des étrangers mais des arméniens, des compatriotes.

 

Si nous avons réussi au Vème siècle à faire, d’un coup, une langue arménienne riche, complète et enviée ce n’est pas par science innée mais par mixage continuel et renouvelé au travers des servitudes, des victoires ou des redditions, tout autant que par le travail intelligent et éclairé de Notre Eglise.

 

Voilà en quelques lignes et quelques pensées jetées à la hâte sur ces pages, l’esprit et le sens dans lequel le travail de rédaction de ce dictionnaire a démarré.

 

Je n’imaginais pas ce à quoi je m’attaquais !  il ne faudrait plus me demander de recommencer un travail semblable seul, comme cela a été le cas pour celui-ci, sans aucune assistance, sans conseils, sans aide ni apport externe.

 

Ce dictionnaire :

 

Cet ouvrage est le fruit d’un long travail de recherche, collation et gestion de données, croisement de traductions, contrôle grammatical et orthographique, recueil de données linguistiques relevées dans de nombreux dictionnaires et ouvrages anciens édités à Venise, Constantinople et Beyrouth. Une bibliographie détaillée, jointe en introduction, des ouvrages utilisés ou consultés montre l'importance du travail de recherche et de contrôle.

 

Nous avons également complété nos travaux par la recherche, l’étude et l’analyse de mots relevés dans des ouvrages, plus récents, édités à Erevan.

 

Dans la partie « entrées françaises »  nous y avons ajouté des tournures, expressions et formes propres au français actuel, celui que chacun peut lire dans le journal, dans un livre ou entendre à la télévision, mais aussi dans la rue, dans la vie courante ou au contact des gens.

 

Nous avons volontairement ajouté dans les traductions des mots non « occidentaux »  mais principalement arméniens de toutes tendances car un dictionnaire est avant tout un outil pour tous les arméniens et non celui de « certains ».

 

Vous y trouverez aussi des orthographes différentes suivant l’origine de la traduction. Le respect du travail d'autrui étant avant tout un gage de respect pour le vocable car imaginez un instant que la conversion grammaticale soit laissée libre au gré du traducteur: nous risquerions de ne plus reconnaître les mots à force de les lire sous différentes formes orthographiques.

 

Ces différentes orthographes ne sont pas volontaires, ni provocatrices mais indispensables pour enrichir le dictionnaire de mots qui autrement n'y trouveraient jamais place.

 

La forme d’expression Mesropienne actuelle est pauvre en mots modernes et contemporains. L’on ne travaille pratiquement plus sur son évolution ce qui fait qu’elle a cessé de s’enrichir et d’évoluer et ceux restants ont beaucoup perdu de leur éclat.

 

La forme d’expression Aberian, elle, n’est pas encore aussi évoluée que l’a été, il y a un siècle, la forme Mesropienne.

 

Nous voyons pourtant sans conteste que la première est en réel déclin alors que la seconde est jeune, en croissance et pleine de vitalité.

 

Il ne faut pas avoir de préférence partisane pour une forme linguistique plutôt qu'une autre de notre langue, commune à plus de 7 millions de compatriotes. Il faut demander et intégrer l’apport et la participation des linguistes de l'Etat Arménien qui en représente plus de la moitié, et  prendre, lorsque cela est bon et utile, le fruit de la création linguistique et vocable de cette grande moitié.

Il faut aussi savoir relever l’erreur et la corriger lorsqu’une des parties se trompe !

 

Bien entendu après avoir dit ce que venez de lire certaines personnes s'empresseront peut être de me jeter la pierre car l'on cherche toujours plus faible que soit pour  justifier son acte partisan.

 

Je veux, à l’avance, dire à ceux-là que parler c’est bien mais faire c’est mieux, c'est pourquoi la plus éclatante façon de montrer des capacités de discernement est de venir m'aider à faire mieux que ce qui est déjà fait, car alors nous serons amis; dans le cas contraire le silence est de mise.

 

Il s’est avéré que la solitude dans laquelle l’entourage, à qui je me suis adressé, m’a laissé n’a pas été bon dans tous les cas. De longues années de concentration et de travail devant un écran cathodique, de nombreuses lectures et de nombreuses comparaisons ne m’ont pas protégé autant que je l'espérais.

 

C'est pour cette raison que vous y trouverez des oublis, des inversions de caractères ou des fautes. Je me dois de vous en informer car il ne faut pas se créer une auréole sans la mériter et le mérite viendra ou pas selon l’appréciation que vous porterez à cet ouvrage.

 

Les défauts et les faiblesses d’un premier ouvrage de cette importance sont la rançon à la nouveauté.  Il est plus facile de rétorquer que de créer. Mais je propose à toute personne de bonne disposition de participer à la future édition.

 

Que chacun sache que, pour éditer ce livre avec mes petits moyens,  j’ai contracté un emprunt pour lequel je paye des intérêts. Tout ceci dans un seul but: la satisfaction d’avoir donné à ma communauté un ouvrage que je crois utile et indispensable. La diaspora Arménienne de France était la seule à ne pas avoir réalisé son dictionnaire français-arménien dont nous avions tous besoin et nous restions tributaires d’éditions extérieures qui ne nous donnaient qu’une relative satisfaction.

 

Veuillez le faire savoir à votre entourage: Je serais toujours disponible pour écouter et étudier les remarques, conseils, propositions et suggestions. Ils sont les bienvenus. 

 

En première page de couverture du dictionnaire est apposée une étiquette adhésive avec mes coordonnées afin que l’on puisse me contacter.

 

 

J’attends de vos nouvelles.

 

Merci de votre attention.