Par
Khatchig Mouradian (khatchigm@hotmail.com)
le 8 mai 2004.
L'entretien a eu lieu à Beyrouth.
Igor
Mouradian a joué un rôle clé
dans les premières phases de la lutte
pour l'auto-détermination du Karabagh.
Il est membre de 'The International Institute
for Strategic Studies' (IISS).
Le Dr. Mouradian est également l'auteur
d'un certain nombre de livres, en russe, sur
la géopolitique et la géoéconomie
: http://news.artsakhworld.com/igor _muradian/main/eng/index.html
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Aztag
: Quelle est votre position sur l'équipe
actuelle qui dirige la Géorgie ?
Igor Mouradian : Il était clair
depuis longtemps que le changement de politique
en Géorgie pencherait vers la droite
et non pas vers la gauche. La droite en Géorgie
allait devenir la plus populaire et la plus
active dans l'arène politique. Cela
un rapport avec les USA. La Géorgie
a toujours été encline à
démontrer son orientation vers l'Occident.
En fait, ce n'était qu'une déclaration,
l'orientation était uniquement vers
les USA. Cependant, les USA maintiennent un
cadre très rigide dans leur politique
internationale en général et
régionale en particulier. Certains
pensent que la politique US est très
vaste, mais c'est une illusion. Les intérêts
de la Géorgie et des autres pays de
la région ne peuvent pas entrer dans
le cadre de l'intérêt de USA,
et pour cette raison même, la situation
est dramatique.
L'Arménie a choisi une voie différente.
Quelques analystes l'accusent d'être
isolée. C'est faux ! Ces gens soit
ne comprennent pas les réalités
sur place, soit mentent tout simplement. En
fait, l'Arménie a une politique internationale
très équilibrée. La
Géorgie et l'Azerbaidjan, à
cause de leur politique, sont beaucoup plus
isolés que l'Arménie. Le principal
problème de la Géorgie est que
le régime n'est pas adéquat.
Les dirigeants sont pires que des marionnettes,
ils sont extrêmement dépendants
des signaux étrangers. Ils sont incapables
de mener une politique internationale à
long terme, car les USA leur demandent de
résoudre rapidement des questions importantes.
Le nouveau président géorgien
ne comprend pas réellement les problèmes
de la politique étrangère géorgienne.
Aztag
: quels sont ces problèmes ?
Igor Mouradian : Ce pays a choisi son
principal profil politique et économique
qui est basé sur le développement
du transit et des services. Si on veut réussir
comme pays de transit, on doit veiller à
établir de bonnes relations avec ses
voisins. La Géorgie ne peut vraiment
pas développer le modèle qu'elle
a choisi alors qu'elle est en conflit ou en
confrontation avec la Russie. Naturellement,
on peut comprendre pourquoi les dirigeants
se comportent ainsi : la Russie a mené
des politiques inconsistantes dans la région
et n'a pas fait grand chose pour améliorer
ses relations avec la Géorgie.
Le problème principal auquel la Géorgie
a à faire face en ce moment n'est pas
l'Adjarie, ni l'Abkhazie, ni même les
questions économiques, mais la création
d'une administration efficace et centralisée.
La plupart des membres de la nouvelle administration
ont déjà une expérience
du travail administratif, mais sans résultats
positifs. A mon avis, l'administration géorgienne
actuelle est illégitime, inadéquate,
et indubitablement provisoire.
Aztag
: Comment peut-elle être illégitime
? après tout, c'est le peuple qui a
placé cette administration au pouvoir.
Igor Mouradian : Aucune révolution
ne peut créer un gouvernement légitime
; elle peut créer des régimes
efficaces, mais jamais de gouvernement légitime.
La Géorgie n'en a aucun. Les dirigeants
sont très ambitieux et refusent d'être
cohérents en fondant un régime
bien équilibré. Le régime
actuel court à la catastrophe. Les
influences étrangères sont trop
fortes. La situation est très dangereuse
pour Erevan, non parce que cette expérience
pourrait aussi se répéter en
Arménie, mais parce que la situation
actuelle en Géorgie est néfaste
pour nos intérêts et pour nous.
Aztag
: Et quels sont, à votre avis, les
facteurs qui font de l'instabilité
de la Géorgie un problème pour
l'Arménie ?
Igor
Mouradian : Un seul et unique facteur
: la Communication. Même la situation
des Arméniens en Géorgie n'est
pas tellement un problème. Les politiciens
des USA, de l'Europe et du Moyen-Orient s'intéressent
à la question suivante : le scénario
géorgien pourrait-il se produire également
en Arménie ? C'est de la foutaise !
Nous avons un système social et économique
complètement différent, notre
pays est en train de se développer
très rapidement, les défauts
du régime au pouvoir sont compensés
par la présence et les activités
de structures politiques très stables
à l'intérieur du pays, activité
parlementaire et autres facteurs. Nous avons
créé une armée puissante,
et en même temps un système de
sécurité très efficace.
L'Arménie approche d'une période
où l'opposition va être représentée
par des forces nationalistes. Les partis politiques
orientés vers la Russie, l'Europe,
ou les USA vont refuser de maintenir des politiques
qui n'ont rien à voir avec des facteurs
externes. L'Arménie va devenir un état
patriotique nationaliste. A cet égard,
nous pouvons devenir un exemple aux autres
états indépendants. Et naturellement,
notre principal problème sera celui
de la direction, mais notre administration
est beaucoup plus performante. Le problème
de la direction est un problème qui
date de dizaines d'années, cela ne
vaut donc pas la peine d'accélérer
le processus. La révolution n'est pas
quelque chose de nécessaire. La révolution
n'aurait un sens que dans un seul cas : si
le régime au pouvoir ignorait les intérêts
nationaux.
Aztag : les médias occidentaux
qualifient les dirigeants géorgiens
actuels de " nationalistes " et
de " pro-occidentaux " . Vous dites
que le gouvernement de Sahakashvili est extrêmement
dépendant des USA. Comment ce dilemme
de nationalisme/dépendance peut-il
s'expliquer ?
Igor
Mouradian : Chaque pays a sa propre notion
du nationalisme. Les nationalistes ne peuvent
pas être " anti ". Si le nationalisme
est dirigé contre un but politique,
ou une force politique majeure, alors il est
défectueux. Le nationalisme doit non
seulement maintenir l'unicité de notre
propre nation mais aussi celle des autres
peuples ; le libéralisme et l'unicité
des autres nations. Il se peut que les dirigeants
de Géorgie ne soient pas réellement
des nationalistes. Ou ce pourrait être
un régime pseudo nationaliste, ou un
régime raciste. Après tout,
n'importe quelle idée pourrait être
pervertie. Le fait est que la Géorgie
a établi un système politique
européen. La gauche et la droite sont
très évidents. L'Arménie
n'a pas cela. L'Arménie a un schéma
différent : les conservateurs et les
libéraux. Je ne pense pas qu'aucun
de ces partis soit meilleur ou pire que l'autre.
Le nationalisme géorgien n'est pas
devenu une force d'union. Il n'a pas créé
une idée nationale. En outre, la politique
du régime a divisé la société.
Certes, la situation en Arménie n'est
pas idéale. Là, l'affrontement
entre le semblant de libéralisme, et
le conservatisme, va devenir plus violent
avec le temps. Il faut se rappeler qu'en Arménie
le nationalisme a de très profondes
racines. On peut même parler de fondamentalisme
national.
Malheureusement, notre situation sociale ne
permet pas à notre idéologie
nationale de devenir une réalité.
Il faut se rappeler que le Mouvement National
Pan-Arménien et les satellites de ce
mouvement ne sont pas accessoires. Le but
fondamental de ce mouvement était une
modernisation idéologique, un désir
de moderniser la politique arménienne...
aurait pu avoir des résultats positifs,
naturellement, mais les buts visés
étaient très bas.
Aztag
: Actuellement, Ankara pose plus fréquemment
la question de l'ouverture des frontières
avec l'Arménie. Certains analystes
disent que la partie arménienne pourrait
être gagnante dans cette action, au
niveau économique, mais subirait des
pertes sur le front politique. Quels sont
là les facteurs en jeu ?
Igor
Mouradian : Les intérêts
économiques et les intérêts
nationaux ne sont pas forcément contradictoires.
Actuellement, nous avons déjà
des relations commerciales avec la Turquie.
Selon différentes estimations, nous
achetons à la Turquie des marchandises
valant environ entre 100 et 160 millions de
dollars US. Politiquement, cela ne change
pas grand chose. Il y a deux problèmes
majeurs pour les USA dans la région
: les relations russo-géorgiennes et
les relations turco-arméniennes. Ces
deux problèmes ont en commun l'idée
de se débarrasser des influences russes.
En dépit du fait que les relations
entre les USA et la Turquie se sont détériorées
récemment, et continuent à se
détériorer car les USA n 'insistent
pas pour résoudre le problème
chypriote, les USA continuent à s'efforcer
d'améliorer les relations arméno-turques.
L'idée américaine est très
simple : l'amélioration des relations
entraînera la sécurité.
L'Arménie sera beaucoup plus sûre.
C'est un mensonge, ou un manque d'appréciation
de la situation. Les relations peuvent être
améliorées, il se peut que la
frontière s'ouvre à quelques
endroits et que les investissements commencent
à affluer vers la Turquie et l'Arménie,
mais la menace persistera. La Turquie n'apprécie
que les positions fortes. Nous devons être
forts afin de devenir des partenaires de la
Turquie. Nous avons maintenant une armée
forte, un système de sécurité
efficace et avons développé
des relations internationales. Nous sommes
mieux préparés à entamer
des relations avec la Turquie. Toutefois,
il nous faut séparer deux choses qui
n'ont aucun rapport entre elles : notre développement
économique, et nos relations avec la
Turquie qui incluent la question de la reconnaissance
du Génocide.
Aztag
: Mais le facteur économique ne pourrait-il
être utilisé pour faire pression
sur l'Arménie afin d'obtenir d'autres
concessions sur le front politique ?
Igor
Mouradian : Nous parlons de l'Arménie
comme d'un pays quelconque qui n'aurait rien
à voir avec nous. L'Arménie,
c'est nous. Elle dépend entièrement
de nous. Nous devons régler nos problèmes
et non pas ceux de la Turquie. Nous devons
faire tout notre possible pour nous assurer
que nous avons un gouvernement avec un programme
nationaliste et non pas une marionnette. Le
refus d'insister pour la reconnaissance du
génocide arménien, les concessions
sur le problème du Karabagh, n'amélioreront
pas nos relations avec la Turquie. La Turquie
ne s'intéresse absolument pas au Karabagh,
ni à nos opinions sur le programme
nationaliste et le gouvernement marionnette,
ou l'Azerbaidjan. Ce sont des illusions que
nous nous faisons. La Turquie a ses propres
priorités, ses propres problèmes.
Elle est plus intéressée par
la question du génocide que par celle
du Karabagh, mais elle veut montrer à
la communauté occidentale qu'en dehors
de la question du génocide, elle s'intéresse
aussi à celle du Karabagh.
Aztag
: Quels sont les buts stratégiques
de la Turquie dans la région ?
Igor
Mouradian : Elle veut parvenir avant les
autres à dominer la région économiquement
et politiquement. A part le pan-turquisme,
il y a aussi la doctrine du néo-ottomanisme.
Lorsqu'il est apparu clairement que la Turquie
n'était pas capable de maintenir sa
présence importante en Asie Centrale,
et que les USA ne feraient rien pour aider
la Turquie à devenir une puissance
eurasienne, la Turquie s'est mise à
s'intéresser au néo-ottomanisme.
Je ne pourrais trouver un meilleur terme pour
décrire cette doctrine selon laquelle
la Turquie doit aspirer les peuples non-turcs
(Albanais, Bosniaques, Géorgiens, Tchétchènes
et Ouzbèks) dans la politique turque.
Maintenant, la Turquie s'intéresse
à des régions plus proches comme
le Caucase, les Balkans, l'Ukraine et l'Irak.
Il est très important que les communautés
arméniennes des USA et du Moyen Orient
comprennent ceci : les USA mènent actuellement
une politique anti-turque dans le Caucase.
Ils font tout leur possible pour s'assurer
que la Turquie perde son influence sur l'Azerbaidjan,
tout leur possible pour obliger la Turquie
à créer d'autres bases aériennes
en Géorgie, et ils utilisent aussi
le facteur arménien comme moyen de
pression. Il semble que les USA aimeraient
créer un petit Israël en Arménie,
tout simplement car l'Arménie est le
pays le plus stable et le mieux organisé
de la région.
Aztag
: Que voulez-vous dire par : " un petit
Israël " ?
Igor
Mouradian : Israël signifie un pays
isolé servant de porte-avion pour les
USA. C'est une perspective très dangereuse
pour nous, nous ne devrions pas permettre
que cela nous arrive, nous devons maintenir
de très bonnes relations avec les pays
arabes, l'Iran et les pays d'Asie Centrale.
Cela est extrêmement important pour
nous. L'Arménie a démontré
que dans des conditions qui sont loin d'être
parfaites, elle peut faire des pas décisifs
dans de nombreux domaines. La Géorgie
et l'Azerbaidjan ne peuvent pas être
des partenaires sérieux pour les USA,
ce sont des partenaires pas fiables du tout
non seulement pour les USA mais aussi pour
la Russie, l'Iran et l'Europe. Il n'y a
que deux pays dans le sud Caucase capables
d'assumer le rôle de partenaires stratégiques
: la République d'Arménie et
le N.K.R.
Aztag
: L'Arménie est fière d'entretenir
d'excellentes relations avec l'Iran, malgré
les différences religieuses et culturelles
entre les deux pays. Quels sont les fondements
de cette alliance ?
Igor
Mouradian : La région est en train
de former de nouvelles alliances et avec de
nouveaux blocs qui n'ont rien à voir
avec l'affiliation religieuse. Ces blocs sont
appelés géo-civilisations et
n'entrent pas dans un cadre culturel et religieux.
Aztag
: Vous ne croyez donc pas à la théorie
de Huntington " Le Choc des Civilisations
" ?
Igor
Mouradian : Si, je crois au choc des civilisations,
mais je pense que les alliances basées
seulement sur des facteurs historiques et
culturels ne fonctionnent pas. Les géo-civilisations
basées sur des intérêts
géopolitiques sont les seules qui marchent.
Les pays slaves sont en train d'agir contre
la Russie, et il y a des tas de conflits entre
des pays chrétiens et aussi entre des
pays musulmans. Et le plus grand conflit de
tous n'est pas le conflit entre l'Islam et
le Christianisme, mais entre les USA et l'Europe.
La civilisation islamique n'a pas de politique
commune. Le monde islamique est utilisé
par de nombreux pays, même par Israël.
Le monde islamique n'est pas capable de créer
une politique commune, même le monde
arabe n'est pas capable de le faire. Par conséquent,
si développées que soient les
relations entre la Turquie et l'Azerbaidjan,
l'Iran ne refusera jamais de maintenir de
bonnes relations avec l'Arménie. Et
cela, à cause d'intérêts
géopolitiques fondamentaux.
Aztag : Quel est l'avenir du conflit
du Nagorno-Karabagh ? le status quo ne peut
pas durer éternellement, n'est-ce pas
?
Igor
Mouradian : Le conflit ne peut pas s'étendre
n'importe où. Il faut comprendre certaines
choses : La Russie n'a pas intérêt
à ce que les choses changent. La Russie
maintient maintenant ses relations avec l'Azerbaidjan
dans une optique complètement différente.
Il y a d'autres questions sur lesquelles la
Russie et l'Azerbaidjan s'entendent très
bien. La Russie soutient le régime
politique de l'Azerbaidjan. Il y a aussi les
questions du pétrole de la Caspienne,
les importations de gaz de la Russie, la question
des immigrants économiques azéris
en Russie, et quelques questions de sécurité
concernant les intérêts russes
dans le nord Caucase. Les dirigeants azéris
ne se font pas d'illusions sur les intentions
russes dans le problème du Karabagh.
D'autre part, l'Europe n'a aucune capacité
opérationnelle dans le Caucase, et
n'a aucun but dans la région. La seule
tâche de l'Europe est de s'assurer que
les Américains se sentent mal à
l'aise ; c'est la seule chose qui l'intéresse.
La Turquie n'a pas du tout le temps de s'occuper
du Karabagh. Les Turcs sont terrifiés
par ce sujet, car s'ils sont accusés
de soutenir un côté, le côté
azéri, cela va créer pour eux
un autre problème, celui d'entrer dans
l'Union Européenne. L'Iran aussi est
très satisfait du status quo.
Quant aux USA, ils n'ont que trois buts :
pétrole, pétrole et pétrole.
Quelquefois les gens mélangent les
priorités et les buts. La priorité
est la stabilité, et le status quo
correspond parfaitement aux intérêts
des USA. L'administration US a eu la chance
de voir par elle-même à Key West
qu'il n'y avait aucune solution politique
au problème du Karabagh, pouvant être
résolue militairement. Les USA soutiennent
l'administration azérie actuelle à
une condition :Ilham Aliev ne doit pas essayer
de résoudre le problème du Karabagh
par l'option de la guerre. Pour les USA, s'il
n'y a pas d'issue politique, il n'y a aucune
autre issue.
Si vous m'aviez demandé il y a trois
ans " Quel est l'avenir du Karabagh ?
" je vous aurais répondu que cela
va rester ainsi pendant des dizaines d 'années,
et le Karabagh va être capable de se
développer avec succès dans
son état actuel. Mais maintenant que
je vois les mouvements et tendances actuelles,
je commence à comprendre que la communauté
occidentale va avoir à décider
du statut de territoires incontrôlés
(Kosovo, Bosnie, Taïwan, Sumatra, Palestine,
Karabagh, Adjérie, Abkhazie, le Kurdistan
irakien et la Chypre du Nord, et peut-être
encore dix autres territoires, y compris le
Cachemire et quelques territoires d'Afghanistan).
On me demande parfois : " combien de
membres du Congrès américain
connaissent le nom du président du
Nigeria ? " Je ne crois pas qu'il y en
ait beaucoup. C'est un pays de 100 millions
d'habitants. Cependant, Ghougassian, le président
du Karabagh, est connu de tous les membres
du Congrès, de même que Denktash.
Ils jouent un rôle très important
dans l'équilibre des pouvoirs…Le Karabagh
a plus de chances qu'aucun autre pays d'être
internationalement reconnu. Certes, il y a
un danger lors des discussions sur la reconnaissance
du N.K. La question des territoires va être
soulevée, mais il y aura probablement
une porte de sortie. Peut-être que le
Karabagh va jouer un rôle exceptionnel
dans l'histoire politique en démontrant
comment un pays minuscule à peine sorti
d'une guerre sanglante et féroce peut
créer une société démocratique
fascinante.
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(Source
: Aztagdaily - Rubrique interviews)
Traduction Louise Kiffer