I
- Généralités
Le
meurtre de masse des Arméniens
organisé dans l'Empire Ottoman
pendant la Première Guerre Mondiale
est considéré comme le
premier génocide du 20ème
siècle. En outre, plusieurs spécialistes
de l'Holocauste (Y. Bauer, L. Davidowicz,
I.L. Horowitz, I. Charny, R. Rubenstein)
par différents moyens reconnaissent
que le Génocide arménien
était plus qu'un simple précédent.
Il devint en fait un lien conduisant
à l'Holocauste juif qui s'ensuivit,
à cause de l'impunité
accordée aux auteurs du Génocide
par le monde civilisé. Ce n'est
donc pas par hasard que sur le mur de
granit du Hall de l'exposition du Musée
de l'Holocauste US à Washington,
D.C est gravé en lettres en relief
la déclaration suivante de Hitler
: " Qui, après tout, parle
aujourd'hui de la destruction des Arméniens
? " Le dirigeant nazi réassurait
ainsi à ses officiers à
la veille de la seconde guerre mondiale
que ses initiatives génocidaires
imminentes étaient également
vouées à l'oubli.
Puisque
le génocide en général
dénote non seulement l'idée
d'extermination, mais comporte également
l'idée de l'extermination de
l'ensemble d'un groupe religieux, ethnique
ou national, les victimes de ce crime
capital incluent les enfants. En vérité,
ils sont presque toujours devenus partie
intégrante de la population victime.
C'est pour cette raison que le sort
génocidaire des enfants n'a pas
été traité séparément
de celui de le totalité de la
population victime. Cela se comprend
au niveau opérationnel du crime
de masse, où les différences
d'âge, de sexe, de statut socio-économique,
de religion, de race ou de nationalité
tendent à se dissoudre brutalement.
Elles s'effondrent dans une catégorie
indifférenciée de gens
destinés à une destruction
imminente. Malgré cet obstacle
majeur, cependant, au cours des récentes
décennies, des études
ont été faites en vue
de discerner certains aspects ou modèles
relatifs au traitement génocidaire
des enfants. Cet essai fournit un aperçu
à travers lequel les enfants
sont perçus comme une sous-catégorie
distincte d'une plus grande catégorie
de la population victime totale.
L'étude
du Génocide arménien permet
l'identification et l'examen d'une telle
sous-catégorie. Plusieurs facteurs
ont joué un rôle dans ce
cas, mais plus particulièrement
l'idéologie du groupe auteur
du crime, l'arrière plan historique
du conflit turco-arménien et
les instruments utilisés pour
le meurtre de masse. Un bref commentaire
à ce sujet s'impose donc.
Différent
de plusieurs autres génocides
du 20ème siècle, le Génocide
arménien n'est pas un phénomène
sui generis, mais plutôt le point
culminant d'un processus historique.
Ainsi, il a été précédé,
pendant des dizaines d'années,
d'une série de massacres périodiques,
dont les auteurs n'ont jamais été
poursuivis, ni sanctionnés par
la justice. Prévoyant avec crainte
la colère des grandes puissances
d'Europe, les auteurs de ces massacres,
en particulier ceux de 1894-1896, ont
agi avec une certaine retenue, car les
femmes et les enfants ont été
généralement épargnés.
Au lieu de devenir totalement exterminateurs,
ces massacres, accompagnés d'une
dévastation à grande échelle,
avaient pour but de paralyser la population
de l'Empire Ottoman. Le fait que vers
1915, au début du génocide
de la Première Guerre Mondiale,
cette même population avait recouvré
ses forces et était devenue une
communauté viable et organisée,
a incité les dirigeants Jeunes
Turcs à envisager le génocide.
Le slogan était : " Cette
fois-ci nous ferons un travail complet
" ! En d'autres termes, aucune
catégorie d'Arméniens
ne serait exemptée de destruction.
L'impunité dont avaient bénéficié
les auteurs des précédentes
séries de massacres les avaient
suffisamment encouragés à
s'embarquer dans des opérations
de meurtres de masse sans distinction.
En conséquence, ces dirigeants
décidèrent d'utiliser
des " meurtriers sanguinaires "
(kanli katil) comme instruments du massacre.
Des milliers de criminels et de récidivistes
furent sélectionnés et
relâchés des différentes
prisons de l'Empire Ottoman pour cette
tâche de massacre. Ils ne devaient
montrer aucune compassion ni pitié
aux femmes, aux enfants et aux infirmes.
La variété de méthodes
féroces et sadiques avec lesquelles
des milliers d'enfants arméniens
furent assassinés reflète
l'efficacité de cet arrangement
administratif. Comme l'a reconnu un
officier turc après la guerre
" les pires crimes contre les Arméniens
furent perpétrés par ces
criminels " (en büyük
cinayetleri ika ettiler).
Il
y a encore un autre aspect de cette
condition de différence de traitement
des enfants concernant le Génocide
arménien. Contrairement aux Nazis
racistes, par exemple, les Turcs ottomans
appréciaient la valeur des gênes
des enfants arméniens incorporés,
ils étaient considérés
comme une ressource inestimable pour
l'enrichissement génétique
de la nation turque. Par conséquent,
à chaque fois que c'était
possible, les Turcs musulmans, et les
orphelinats dirigés par des Turcs
désignés par le gouvernement,
étaient encouragés à
rassembler des multitudes d'orphelins
arméniens, principalement des
garçons, et à les élever
en tant que Turcs après quelques
rituels de conversion à l'Islam,
y compris les circoncisions et changements
de noms.
C'est
sur cet arrière plan que le sort
génocidaire des enfants arméniens
pendant la Première Guerre mondiale
peut être considéré
comme une catégorie à
part.
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II
- La variété de méthodes
de liquidation des enfants
Une
partie significative des enfants arméniens,
de même que les deux autres principaux
segments de la population arménienne
de l'Empire, c'est-à-dire les
femmes et les vieillards, succombèrent
à de grandes misères,
associées aux pénibles
marches forcées d'une série
de déplacements et déportations
vers les déserts désolés
de Mésopotamie, actuellement
en Syrie. Ces marches étaient
organisées de manière
à accentuer les misères,
en prolongeant délibérément,
par exemple, les routes des convois,
en refusant l'eau et la nourriture,
et en terrorisant, de différentes
façons brutales de mauvais traitements,
les déportés déjà
dans un état de faiblesse critique.
Le danger, l'épuisement, la faim
, la maladie et les épidémies
aggravèrent le fardeau des victimes,
composées désormais d'êtres
usés à mort.. Il faut
noter à ce sujet que l'absence
d'hommes valides dans ces convois de
déportés était
due au fait que presque tous avaient
été mobilisés au
début de la guerre et ensuite
graduellement supprimés de différentes
manières.
Une
autre partie importante des enfants
arméniens a été
victime d'un vaste éventail de
massacres commis dans tous les coins
de l'Empire Comme l'a déclaré
l'ambassadeur Henry Morgenthau, pour
économiser " de la poudre
et des balles " la population paysanne
musulmane de la campagne, agissant comme
groupes de soutien aux gangs criminels
recrutés pour le devoir de massacre,
utilisaient " des massues, des
marteaux, des haches, des faux, des
épées et des scies. De
tels instruments causaient de plus longues
agonies que les fusils et pistolets
" écrit l'historien britannique
Arnold Toynbee dans son importante compilation
des récits de témoins
oculaires du Génocide arménien,
pleine de détails sur ces types
d'atrocités.
Des
preuves dignes de confiance indiquent
qu'en général la méthode
de massacre immédiat fut premièrement
appliquée dans des opérations
dirigées contre la population
mâle des 6 provinces d'Anatolie
suivantes : Sivas, Diyarbekir, Harpout,
Erzeroum, Bitlis et Van, auxquelles
on peut ajouter la province de Trabzon.
Toutes ces provinces, considérées
comme des points chauds, ou des sujets
de disputes dans le conflit persistant
turco-arménien, furent mises
sous la juridiction du Haut Commandement
de la Troisième Armée
dont le Q.G. était à Erzeroum.
La
liquidation continue, estimée
à 90 % des mâles valides
de ces provinces, fut effectivement
commise au printemps et en été
de 1915, par le Général
Mahmud Kâmil, commandant en chef
de la 3ème armée. Le reste
de la population devait être liquidé
indirectement par des marches de déportation
épuisantes et sans fin.
Mais
dus à l'intervention de plusieurs
facteurs, dont les fantaisies des organisateurs
locaux respectifs du meurtre de masse,
les procédés d'extermination
ne furent ni uniformes, ni réguliers,
en ce qui concerne la différenciation
entre le massacre immédiat et
la déportation. La totalité
de la province arménienne de
Bitlis, par exemple, qui comportait
presque entièrement des vieillards,
des femmes et des enfants, fut détruite
à l'intérieur des frontières
de la province. Il n'y eut pour ainsi
dire pas de déportation. Excepté
pour la ville de Van elle-même,
le reste de la population arménienne
de la province de Van, province qui,
avec celle de Bitlis comprenait le berceau
de la nation arménienne, fut
exterminée de même par
une série de massacres locaux.
Dans les provinces de Sivas, Harpout,
Trabzon, Erzeroum, Dyarbekir, de même
que dans les sandjaks indépendants
d'Ourfa et de Marash, le génocide
fut accompli en partie par des déportations
et en partie par des massacres.
Dans
toutes ces opérations, les enfants
faisaient partie de la population générale
ciblée pour une destruction totale.
Malgré cela, dans de nombreuses
circonstances, ils furent aussi soumis
à des formes séparées
et différenciées de meurtres
de masse. Ce fut le cas à chaque
fois que des enfants ont constitué
un groupe distinct et séparé.
Dans la province de Trabzon, par exemple,
des milliers d'enfants ont été
laissés à l'arrière
alors que les adultes étaient
poussés dans les convois de déportation.
Dans les déserts de Mésopotamie,
dans le district de Deir-Zor en particulier,
des milliers d'enfants émaciés,
survivants squelettiques des marches
de déportation, furent ainsi
ciblés comme une catégorie
distincte. A Erzincan,, dans la province
d'Erzeroum, des centaines d'enfants
abandonnés ont constitué
également une cible séparée.
Ce qui
suit est un résumé des
principales méthodes de tuerie
employées : par exemple, les
opérations de noyade, de groupes
brûlés vifs, les viols
collectifs précédant la
tuerie, au cours desquels des milliers
d'enfants arméniens connurent
leur sort génocidaire pendant
la période 1915-1916. Comme spécifié
par le vice-consul allemand de Mossoul,
et par le décret gouvernemental
turc, les garçons et filles jusque
13 ans faisaient partie de la catégorie
" enfants ".
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Trabzon
: microcosme de tuerie d'enfants à
tous les niveaux.
Opérations de noyade et viols
en série.
Ville
portuaire principale sur la Mer Noire,
et capitale de la province du même
nom, Trabzon a servi de creuset du Génocide
arménien. Presque toutes les
formes et aspects de ce crime furent
conçus et appliqués là
avec succès. Les éléments
cités ci-après sont des
extraits du livre de Vahakn N. Dadrian
: " The Framework. The Armenian
Genocide. An Interpretation " ed.
Cambridge University Press. Section
III Le cas de Trabzon.
Comme
indiqué ci-dessus, quelque 3000
enfants furent laissés à
l'arrière en tant qu'orphelins
dans différents bâtiments
de Trabzon. Au cours des procès
du Tribunal militaire turc au printemps
1919, environ 2 douzaines de Turcs,
comprenant des médecins, des
officiers militaires, des personnalités
gouvernementales et des commerçants,
pendant 20 séances, témoignèrent
oralement et par écrit des méthodes
utilisées pour disposer de ces
enfants. Deux docteurs en médecine,
le docteur Ziya Fuad, Inspecteur des
Services de Santé, et le Docteur
Adnan,, Directeur des Services de Santé
de la ville, ont attesté d'après
les preuves réunies par les médecins
turcs locaux, que le Docteur Ali Saib,
directeur de la Santé Publique
de la province de Trabzon, avait systématiquement
empoisonné des jeunes enfants
amenés par l'Hôpital du
Croissant Rouge de la ville, et avait
donné l'ordre de noyer dans la
Mer Noire proche ceux qui avaient refusé
de prendre son " médicament
". Une autre méthode employée
par le Dr. Saib dans la maison pleine
de jeunes enfants arméniens était
le " bain de vapeur ". Installés
dans une " étuve "
de l'armée, les bébés
étaient exposés à
la suffocation par la vapeur chaude,
et instantanément tués.
Le Père Laurent, Père
Supérieur français franciscain
de Trabzon, a témoigné,
par l'intermédiaire d'un interprète,
qu'il avait personnellement vu les cadavres
des enfants morts empoisonnés,
pressés dans de grands et profonds
paniers sur le sol de l'hôpital,
comme des animaux d'abattoirs, puis
jetés dans la mer.
Ce même
Hôpital du Croissant Rouge avait
été transformé
en dôme du plaisir, où
le Gouverneur général
de la province, Cemal Azmi, gardait
15 jeunes filles, (10 ème séance
de la Cour martiale du 12 avril 1919)
à utiliser lors de fréquentes
orgies sexuelles. Ce fait avait incité
l'Inspecteur des Douanes Nedim à
dénoncer le gouverneur (16ème
séance) et le Lieutenant turc
Hasan Maruf à exposer le fait
supplémentaire qu' après
avoir commis les pires outrages, les
officiels gouvernementaux impliqués
avaient fait tuer ces jeunes filles.
Dans une étude séparée,
un jeune Arménien qui avait été
l'ami du fils du gouverneur de Berlin,
où le Gouverneur avait trouvé
refuge aussitôt après la
guerre pour échapper aux procès
en Turquie, fournit un renseignement
supplémentaire sur cet épisode
de débauches fatales : au cours
d'une de ses vantardises au sujet de
ces débauches, le Gouverneur
Azmi avait dit au jeune Arménien
(croyant qu'il était turc, car
il avait assumé complètement
une identité turque musulmane,
y compris un nom turc Mehmed Ali, étude
complète du Coran, la Loi Sacrée
Islamique, et la circoncision) "
Parmi les plus jolies fillettes de 10-13
ans, j'en ai choisi un certain nombre
et les ai offertes à mon fils
(qui avait alors 14 ans) comme cadeau,
les autres je les ai noyées dans
la mer ".
Au
cours de ces procès de la cour
martiale, Nuri, le chef de la police
de Trabzon, a reconnu avoir conduit
à Istanbul plusieurs jeunes filles
arméniennes comme cadeaux du
gouverneur Azmi aux dirigeants du parti
CUP - Comité Union et Progrès
- (9ème séance, 10 avril
1919) Des faveurs sexuelles similaires
furent accordées, selon les rapports
relatifs à leurs activités,
aux autres potentats du parti Jeune
Turc, tels que le commissaire CUP de
Trabzon, Yenibahceli Nail, qui, selon
le consul U.S. de Trabzon, Oscar S.
Heizer " avait dix de ces plus
jolies filles dans une maison de la
partie centrale de la ville ".
Heinrich Bergfeld, le consul allemand
à Trabzon, avocat professionnel,
et ardent turcophile, dans sa critique
du meurtre de masse de Trabzon, attira
l'attention sur les nombreux viols de
jeunes filles. Dans son verdict, rendu
public à la fin des procès
de Trabzon, le Tribunal souligna le
fait que ces viols en série,
" la violation de victimes impuissantes
" et le fait que " ces jeunes
filles avaient été déflorées
(izaleyi bikr) dans l'hôpital
qui était censé avoir
une mission humanitaire ".
Un des
traits les plus horribles de la tuerie
d'enfants à Trabzon était
la méthode de les noyer en masse,
soit dans le fleuve de Trabzon, Degirmendere,
soit principalement le long des côtes
portuaires de la Mer noire. Le témoignage
le plus poignant sur ces opérations
de noyade fut fourni par le député
turc de cette province, Hafiz Mehmed,
qui était avocat de profession.
Dans
un discours d'après-guerre (11
décembre 1919) à la Chambre
des députés du Parlement
ottoman, il révéla comment
il avait personnellement vu, un jour,
des femmes arméniennes et des
enfants chargés dans des péniches
dans la ville portuaire d'Ordu de la
province de Trabzon, et noyés
en haute mer. Il déclara ensuite
que les habitants locaux se lamentaient
en disant : " Dieu nous punira
pour ce que nous avons fait ".
Lors de la 15ème séance
des procès de Trabzon, un marchand
turc d'Ordu, Hüseyin, appelé
comme témoin, confirma cette
opération de noyade. Dans son
verdict, le Tribunal insista sur ces
références aux opérations
de noyades ciblées spécialement
sur de " jeunes enfants garçons
et filles " (zükur ve inas
cocuklari) avec l'aide de " criminels
récidivistes " (cerayimi
mükerrere). Dans l'un de ses rapports
les plus longs et les plus détaillés
à Washington, US, le consul de
Trabzon, Oscar Heizer, écrivait
également : un certain nombre
de barques furent chargées de
gens à plusieurs reprises, de
sorte que des corps de femmes et d'enfants
ont plus tard été rejetés
par la mer sur la plage de sable, sous
les murs du monastère italien
ici à Trabzon, et furent enterrés
par des femmes grecques dans le sable,
là où elles les avaient
trouvés.
Pour
sa part, Signo Gorrini, le consul général
italien de Trabzon, en un rapport détaillé,
attira l'attention sur le fait suivant
: Les enfants étaient arrachés
à leur famille... placés
par centaines dans des bateaux avec
seulement leurs chemises, chavirés
et noyés dans la Mer Noire et
le fleuve Degirmendere. Ce sont là
mes souvenirs inoubliables de Trabzon,
des souvenirs qui, des mois plus tard,
tourmentent encore mon âme et
me rendent furieux.
Le Consul
d'Autriche-Hongrie, Ernst von Kwiatkowski,
et le Consul d'Allemagne, Heinrich Bergfeld,
tous deux alliés pendant la guerre
à la Turquie Ottomane, promus
docteurs en histoire et en droit, respectivement,
envoyèrent à Vienne et
à Berlin de nombreux télégrammes
chiffrés, mentionnant "
des femmes et des enfants chargés
dans des péniches, conduits en
haute mer et noyés là-bas
". Le colonel Stange, officier
de combat allemand de plus haut rang,
dont le régiment de Turcs irréguliers
avait d'abord été rassemblé
à Trabzon, confirma ces opérations
de noyade (auf's Meer hinausgefahren
und dannüber Bord geworfen). Après
avoir dénoncé dans son
rapport " secret " envoyé
au Quartier Général allemand
ces actes de " brutalité
bestiale " perpétrés
par de la 'racaille' (Gesindel) et des
" brigands " relâchés
des prisons, il conclut que toutes ces
opérations faisaient partie et
formaient une parcelle d'un plan global
d'un meurtre de masse complet "
conçu longtemps à l'avance
". Faisant écho à
ces preuves de première main
que les rapports de la Cour martiale
d'après guerre avaient édités,
le journal turc Hadisat souligna les
triples atrocités perpétrées
contre les enfants arméniens
de Trabzon : viols en séries,
empoisonnements et noyades.
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Autres
sites de noyades et de viols en séries.
Les
opérations de noyades ne se limitèrent
pas aux mers et aux fleuves, elles eurent
lieu aussi dans des lacs. Le rapport
du Consul des Etats Unis de Harpout,
Leslie A. Davis, est remarquable à
ce sujet. Dans sa longue analyse du
génocide qui eut lieu dans sa
circonscription, la province de Harpout,
il décrit comment les orphelinats
dans lesquels les enfants arméniens
étaient rassemblés après
l'extermination de leurs familles, servaient
de camps de transit, pour une élimination
postérieure par noyade. Ce rapport
précise que le Consul Davis avait
demandé l'autorisation au gouverneur
général de la province
de Harpout, Sabit, d'ouvrir un orphelinat
pour " les centaines d'enfants
qui arrivaient sans cesse d'autres lieux..."
Répondant que le gouvernement
allait prendre soin d'eux, le gouverneur
refusa cette autorisation. Juste après
que le Consul eût quitté
le bureau du gouverneur, un ordre fut
adressé : Tous les enfants, avec
les autres femmes qui restaient, devaient
partir le mardi suivant, c'est-à-dire
dans trois jours. " Puis les enfants
disparurent, et on apprit qu'ils avaient
été emmenés dans
un lac à environ 20 miles de
Harpout et noyés ".
Le Consul
Davis décrit ensuite la scène
d'horrible boucherie autour du lac de
Goeljuk " distant d'environ cinq
heures de son siège de Harpout
" : " Finalement, un Turc
me raconta très confidentiellement,
qu'il avait vu des milliers de corps
morts autour du lac de Goeljuk, et me
proposa de m'emmener dans les endroits
où ils se trouvaient ".
Le Consul estima que 'dans l'espace
de vingt-quatre heures, nous avions
vu les restes de pas moins de dix mille
Arméniens qui avaient été
tués autour du lac de Geljuk.
Ceci naturellement est approximatif...
Je suis sûr, néanmoins
, qu'ils étaient plus nombreux,
plutôt que moins, que ce chiffre...'
Après avoir décrit les
blessures béantes par baïonnette
sur la plupart des corps nus, généralement
à l'abdomen ou dans la poitrine,
quelquefois à la gorge de victimes
présentant des signes de mutilation
barbare, le Consul Davis déclara
: " Ce qui s'est passé autour
du magnifique lac de Goeljuk en été
1915 est presque inconcevable. Des milliers
et des milliers d'Arméniens,
principalement des femmes et des enfants
impuissants et innocents, furent massacrés
sur ses rives et mutilés d'une
façon barbare ".
Un autre
centre de meurtre de masse par noyade
impliquant spécialement des enfants
fut la Gorge Kemach sur l'Euphrate,
à environ 50 km au sud ouest
d'Erzincan, dans la province d'Erzeroum.
Une grande partie de la population arménienne
de cette province, environ 20 à
25000 , en particulier ceux d'Erzincan,
furent massacrés à l'aide
d'irréguliers, c'est-à-dire
les brigands du 86ème régiment
de cavalerie de la 29ème division
du 9ème Corps d'armée
de la 3ème armée ottomane
du Q.G. d'Erzeroum. D'après un
'rapport consulaire' l'ambassadeur d'Amérique
en Turquie, Morgenthau, a déclaré
qu'à la Gorge de Kemach "
des centaines d'enfants furent passés
à la baïonnette par les
Turcs et jetés dans l'Euphrate
".
De
même, un grand nombre d'enfants
arméniens ont été
détruits par noyade de masse
dans la partie basse de l'Euphrate mésopotamienne,
spécialement dans la zone de
Deir-Zor. L'équivalent arménien
d'Auschwitz. Selon le témoignage
d'un survivant arménien, Mustapha
Sidki, le chef de la police de Deir
Zor, le 10 août 1916, sélectionna
les plus jolies filles d'un convoi de
déportés. Elles furent
emmenées sur un pont de l'Euphrate
où le chef de la police et ses
complices les violèrent. Les
victimes furent ensuite jetées
dans le fleuve pour être noyées.
Le même chef de la police, le
24 octobre 1916, donna l'ordre de transporter
2000 enfants orphelins, les mains et
les pieds liés, sur les rives
de l'Euphrate. Ils furent ensuite jetés
dans le fleuve, deux par deux, à
la satisfaction visible du chef de la
police, qui prenait un plaisir spécial
à la vue du drame de ces noyades.
Comme
décrit ci-dessus au sujet des
atrocités commises à Trabzon,
le viol sous toutes ses formes fut l'un
des aspects les plus communs du Génocide
arménien. Comme l'a admis le
lieutenant turc Hasan Maruf, aux Britanniques
qui l'avaient fait prisonnier "
les cas de viols de femmes et de fillettes,
même publiquement, ont été
très nombreux. Elles étaient
systématiquement tuées
après l'outrage ". Comme
ce fut le cas à Trabzon, des
multitudes de jeunes filles furent transportées
à Constantinople de différents
endroits d'Anatolie, pour divers buts,
y compris le sexe. Une résidente
australienne de Tarse, près d'Adana,
Mrs. Christie, rapporta dans son journal
intime qu'un grand nombre de filles
étaient ramassées dans
les écoles de la cité
et mises à la disposition des
officiers dans les baraques militaires
de la ville " plus d'une centaine
d'entre elles ont été
conduites en automobile à Constantinople
". L'une d'entre elles, d'environ
15 ans, trouva moyen d'échapper
au sort des autres.
Dans
les déserts de Mésopotamie,
dans le triangle formé par les
fleuves Euphrate et Khabour, qui se
rejoignent près de Deir Zor,
le viol était le routine. Selon
un survivant, par exemple, le maire
de Ras-ul-Aïn, Hüseyin Bey,
un Tchétchène, se vanta
d'avoir violé à lui seul,
50 à 60 filles arméniennes.
Ses fils en faisaient autant régulièrement.
Un autre
lieu de viols à grande échelle
était l'usage et l'abus d'églises
arméniennes comme bordels temporaires
. Des jeunes filles arméniennes
étaient rassemblées et
rendues disponibles aux officiers et
soldats turcs. Comme le rapporta un
pharmacien suisse, dans la ville d'Ourfa,
par exemple, " la grande église
arménienne grégorienne,
et le sanctuaire arménien, avaient
été transformés
en bordel. Les officiers militaires,
les gendarmes, les officiers de police,
et de simples Turcs de la ville, venaient
habituellement choisir des filles pour
leur plaisir ". Un épisode
similaire de profanation pour sexe est
relaté par un capitaine turc,
Nebil Bey. Ainsi qu'il l'a rapporté,
quelque 300 jeunes filles " appartenant
aux meilleures familles arméniennes
de Bitlis " furent rassemblées
dans l'église arménienne
de la ville " pour l'usage de l'armée.
Des soldats, ainsi que des officiers
se rendaient à l'église,
qui devint bientôt un foyer de
maladies. Chaque régiment qui
passait par la ville en route pour le
front, laissait ses traces, de sorte
qu'après quelque temps toutes
ces filles infortunées furent
infectées ". En conséquence,
le commandant de Bitlis décida
de punir les filles " pour avoir
épuisé les forces vitales
de l'armée ottomane, et empoisonné
par leur infection les enfants de la
Patrie ".
Certaines
des filles furent empoisonnées,
d'autres furent tuées sur-le-champ.
Le capitaine ajouta que tout cela avait
été fait selon les ordres
du Commandant en chef de la troisième
armée, le Général
Mahmud Kâmil. La liberté
accordée aux militaires et aux
civils turcs de violer à volonté
toute fille arménienne fit des
victimes par épuisement fatal.
Comme le concéda un membre du
tribunal turc, dans Ourfa, 95 % sur
un groupe de 100 soldats... moururent
d'épuisement et de maladie pour
avoir commis des viols excessifs.
|
|
La
liberté de viols homosexuels.
La licence
sexuelle prévalant pendant le
Génocide arménien ne s'est
pas limitée aux jeunes filles
arméniennes. Un pharmacien suisse,
qui pendant la guerre était resté
à Ourfa et avait beaucoup voyagé
dans la région, affirme que beaucoup
de viols homosexuels à grande
échelle ont eu lieu à
la fois lors des tueries génocidaires,
et dans les maisons turques où
de jeunes garçons arméniens
étaient retenus comme adoptés.
Selon ses déclarations "
les officiers turcs, en particulier,
infligeaient des actes incroyables et
indicibles à des filles arméniennes,
mais personne ne peut imaginer l'amplitude
des crimes sexuels contre-nature commis
sur des centaines et des milliers de
garçons arméniens ".
Il affirma même que " longtemps
après la fin des tueries, des
viols, des actes de défloration
de vierges et autres formes de violations
sexuelles, spécialement sur de
jeunes garçons, continuèrent.
"
Les
deux rapports suivants du pharmacien
suisse donnent des exemples de viols
indiqués ci-dessus. Un garçon
arménien, adopté dans
une famille turque de Mezré,
dans la province de Harpout, a écrit
les cas de viols régulièrement
commis par un Turc, en toute connaissance
de sa femme, dans cette maison. Il cite
aussi le cas d'un hodja, un enseignant
musulman, auteur d'une tentative de
viol.
Les
autres cas concernent des viols avant
meurtre. Dans la province d'Ankara,
près du village de Bash-Ayash,
deux violeurs-tueurs, un brigand Déli
Hasan, et un gendarme, Ibrahim, violèrent
12 garçons âgés
de 12 à 14 ans, et les tuèrent
ensuite. Ceux qui n'étaient pas
morts sur le coup furent torturés
à mort, tandis qu'ils criaient
" Maman ! Maman ! "
Enfin,
on peut citer une autre réplique
d'empoisonnement massif d'enfants décrit
ci-dessus dans le cas de Trabzon. Une
survivante de Giresun raconte comment
à Agn (Egin), dans la province
de Harpout, quelque 500 orphelins arméniens
rassemblés de toutes les parties
de cette province furent empoisonnés
avec l'aide du pharmacien et du médecin
local. Après avoir achevé
son opération fatale, le médecin
turc, dit-elle, a déclaré
: " Les Arméniens n'ont
pas de cimetières, l'Euphrate
est leur tombeau " (Ermenilerin
topragi yoktur. Onlarin mezari Yeppraddir).
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L'Holocauste
des Enfants arméniens.
Meurtre de masse infernal en les brûlant
vifs.
Comme
il est écrit au début
de cette étude, les décideurs
et les organisateurs du Génocide
arménien étaient décidés
à appliquer un plan aussi radical
que possible d'extermination totale.
Ils étaient désagréablement
surpris par l'inefficacité des
massacres partiels de l'époque
du Sultan Abdul Hamid, 1894-1896, et
de la façon dont les Arméniens,
loin d'être impotents pour toujours,
avaient, en l'espace d'une vingtaine
d'années, rebondi et reconstitué
une communauté viable et vibrante.
Pour éviter une faute similaire
et atteindre dans le génocide
projeté un effet optimum quant
au résultat, ils inventèrent
une nouvelle tactique : la libération
de milliers de criminels des prisons
de l'Empire. Ils devaient être
aussi vicieux que possible, de manière
à éviter de succomber
à des sentiments occasionnels
de pitié vis-à-vis des
vieillards, des femmes et des enfants,
et à les massacrer sans discrimination
et impitoyablement. On leur joignit
d'autres milliers de Kurdes et d'immigrants
déplacés du Caucase, en
particulier des Tchétchènes
du Caucase, et de la péninsule
des Balkans. Tous ces groupes étaient
remplis de haine envers les Arméniens
envers lesquels ils projetaient leur
animosité anti-chrétienne
héritée de leur conflit
avec le Russie chrétienne ou
les nationalités chrétiennes
de la péninsule des Balkans,
d'où ils avaient été
évincés ou qu'ils avaient
choisi de quitter. Encore plus convaincant,
cependant, était leur sens de
l'avarice et de la cupidité,
et leur envie de lascivité et
de sexualité illimitée.
Dans
les incendies de masse d'orphelins arméniens,
leur sadisme diabolique fut principalement
à l'oeuvre. Après l'élimination
du reste de la population arménienne,
ces survivants étaient devenus
une gêne pour les criminels. De
plusieurs points de vue, il était
estimé plus économique
de mettre fin à leur misère
en les brûlant en masse. Dans
quatre provinces, c'est-à-dire
Diyarbékir, Harpout, Bitlis et
Alep, cette méthode fut appliquée
avec une férocité spéciale.
A Diyarbékir, par exemple, le
docteur Reshid, un Tcherkesse ayant
des racines ethniques dans le Caucase,
et gouverneur général
de cette province, " prit 800 enfants,
les enferma dans un bâtiment,
et y mit le feu ". Qu'une telle
barbarie ne se soit pas limitée
à brûler vifs des enfants
est prouvée par le détail
suivant, extrait du journal d'une missionnaire
catholique française qui se trouvait
là pendant la période
des massacres, c'est-à-dire juin-décembre
1915 : " Dans cette province, c'était
la coutume d'enterrer vivant, dans de
grands fossés ; et dans l'un
d'eux tombèrent des centaines
d'enfants de 7 à 13 ans. Après
un laps de temps de plusieurs jours,
on pouvait voir les ondulations de la
terre qui transmettaient l'agonie de
ces âmes remuant dans les entrailles
de leur hécatombe. " Selon
le compte-rendu d'un témoin oculaire,
dans un autre cas, à Furuncular,
district de Malatya dans la province
de Harpout, les gendarmes enterrèrent
vivants, dans une large fosse creusée
auparavant, 90 à 100 enfants
arméniens âgés de
3 à 4 ans. Les victimes, sentant
leur mort imminente se mirent à
pousser des cris hystériques
et de désespoir, à mesure
qu'elles étaient jetées
dans la fosse, située en un lieu
ironiquement appelé " Le
Jardin des Enfants " (cocuklar
bahcesi). Mais l'abominable opération
fut complétée en quelques
minutes.
Dans
la province de Harpout, l'administrateur
Kadri " brûla à mort
800 enfants natifs de Palu ", province
de Diyarbekir.
Durant
l'une des principales marches vers la
mort de Deir Zor, deux principaux camps
de la mort dans les déserts de
Mésopotamie, Souvar et Shedadiye,
un gigantesque acte d'holocauste fut
commis envers 5000 enfants arméniens.
Pendant 4 jours, environ 60000 déportés
émaciés avaient été
conduits dans ces camps. C'était
le 25 août 1916 (ou 7 septembre
1916 d'après le nouveau calendrier)
le jour du Festival Musulman du Sacrifice
(kurban bayrami). Les orphelins mis
de côté furent entassés
dans un grand orphelinat de Deir Zor.
Ils furent ensuite poussés par
fournées dans un endroit situé
à environ une heure de la cité,
arrosés de pétrole et
brûlés à mort. Cette
méthode d'immolation par holocauste
n'était cependant pas limitée
aux enfants. Selon le récit d'un
témoin oculaire juif, elle fut
infligée pendant la même
période, dans la même région
de Deir Zor, à des multitudes
d'autres Arméniens, principalement
des femmes. Eitan Belkind était
un officier de l'armée turque
et était assigné au Q.G.
de la 4ème armée ottomane,
dont la juridiction incluait Alep, les
déserts de Mésopotamie
et Deir Zor en particulier. Il était
assigné au voisinage du fleuve
Khabour qui passe par Suvar et Shedadiye
.
Voici
son récit : " Après
un trajet de trois jours, j'ai atteint
le coeur de la Mésopotamie, où
je fus témoin d'une terrible
tragédie... Les soldats tcherkesses
avaient ordonné aux Arméniens
de ramasser des épineux et des
chardons et de les empiler en une haute
pyramide, ensuite ils attachèrent
tous les Arméniens qui étaient
là , presque 5000 personnes,
main dans la main, les mirent en cercle
autour de la pile d'épineux et
de chardons et y mirent le feu. Les
flammes montaient jusqu'au ciel accompagnées
des cris des malheureux brûlés
à mort... Deux jours après,
je suis retourné à cet
endroit, et j'ai vu les corps calcinés
de milliers d'être humains. "
Les
opérations les plus étendues
d'incendies de masses d'enfants eurent
lieu cependant dans la province de Bitlis.
La participation massive de certaines
tribus kurdes dans ces opérations
cusa des ravages dans la population
victime. L'instigateur de l'holocauste
était le général
gouverneur de la province, Mustafa Abdulhalik
(Renda), qui se trouvait être
le beau-frère du Ministre de
l'Intérieur, plus tard Grand
Vizir, Mehmet Talaat Pacha, le principal
architecte du Génocide arménien.
Selon le témoignage de l'évêque
catholique arménien de Trabzon
" Ayant rassemblé 1000 jeunes
enfants, le général-gouverneur
Mustafa Abdulhalik les conduisit en
un lieu appelé Tashod où
il les fit brûler à mort
en présence de notables et de
foules turques, tout en criant à
voix haute : 'Il est nécessaire
d'effacer une fois pour toutes le nom
arménien de ces provinces pour
la sécurité de la Turquie'.
Les enfants ou ce qu'il en restait furent
par la suite jetés dans des fossés
préparés à l'avance
spécialement pour eux. Les gémissements
ne ceux qui n'était pas complètement
consumés pouvaient s'entendre
pendant des jours.
Deux
Européens témoins oculaires
ont rapporté aussi ces incidents
d'enfants brûlés vifs.
Une missionnaire suédoise Alma
Johanson, qui dirigeait l 'orphelinat
allemand à Mouch, rapporte que
les orphelins arméniens, avec
le personnel de l'orphelinat, "
furent brûlés vifs "
(lebendig verbrannt) "C'était
bouleversant d'entendre les cris des
gens et des enfants qu'on brûlait
à mort dans leurs maisons. Les
soldats prenaient un grand plaisir à
les entendre " ;
De son côté, M.D.H. Stoffels,
du personnel médical du Corps
expéditionnaire perse, rapporte
au Consul d'Autriche à Trabzon,
que lors de son trajet vers Mossoul,
il traversa Mouch (et Siirt, dans la
même province) " ainsi qu'un
grand nombre d'anciennes localités
arméniennes, où il vit,
dans les églises et les maisons,
les corps calcinés et décomposés
de femmes et d'enfants " (verkohlte
und verweste Fraue-und- Kinderleichen).
On peut
aussi se référer au maire
Venezuelan, volontaire au service de
l'armée turque ottomane lors
de la Première Guerre Mondiale,
et qui fut assigné à servir
dans les régions de Bitlis, Van,
et Mouch, comme Inspecteur général
des Forces turques en Arménie.
Dans ses Mémoires, il déclare
qu'à Mouch " les femmes
et les enfants étaient parqués
et brûlés vifs "
Peut-être que le témoignage
le plus tranchant d'un témoin
oculaire sur le véritable holocauste
des enfants arméniens à
Mouch, dans la province de Bitlis, provient
d'un Commandant de l'armée turque,
le Général Mehmed Vehib.
Chargé de compléter la
partie principale du Génocide
arménien, il fut désigné
Commandant en Chef de la Troisième
Armée en février 1916.
Vaillant officier militaire, il fut
consterné de constater qu'une
nation entière avait disparu
du pays. Un massacre local de soldats
du bataillon de travail arménien
de sa juridiction l'incita à
faire une enquête, à installer
une cour martiale, et exécuter
deux auteurs de génocide. Dans
son rapport détaillé après
la guerre, rédigé à
la requête du Tribunal Militaire
turc, il donne un aperçu de la
nature du génocide qui avait
eu lieu dans les régions des
six provinces orientales sous l'autorité
de la 3ème Armée. Dans
ce rapport, le Général
Véhib témoigne de ce qu'il
a vu personnellement, lors d'une visite
d'inspection. " Des femmes et des
enfants arméniens furent brûlés
vifs dans le village de Tchurig, situé
à 5 km
au nord de Mouch " Il avait vu
les reste des victimes calcinés,
et déclare indigné : "
Il est difficile de trouver en Islam
un parallèle à une telle
atrocité et une telle sauvagerie
" (Tarihi Islamda misli görülmemish
bir zulum ve vahset).
Une
autre source militaire turque crédible,
claire et sans équivoque, confirme
l'holocauste radical auquel furent soumis
les Arméniens de Mouch et des
98 villages arméniens de la plaine
de Mouch - avec la justification douteuse
que " les unités armées
arméniennes attaquaient les soldats
et les villages turcs ". Cette
source révèle également
les opérations de gens entièrement
brûlés vifs, conduites
par le Colonel Kâzim, un officier
de 31 ans, qui avait été
auparavant impliqué dans les
combats à Van, où les
Arméniens s'étaient révoltés
contre la déportation et la destruction
imminentes. Après le 26 juin
1915, la Division Van Gendermere de
Kâzim fut supprimée, et
il devint Commandant de la 36ème
Division à Mouch. Plus tard,
Kâzim (qui avait adopté
le surnom de Özalp) selon cette
source turque, " incendia toute
la vallée de Mouch et supprima
les Arméniens ".
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Les
éléments de licence d'abominations
envers les enfants arméniens
En
règle générale,
le degré de succès d'un
génocide dépend, tout
le reste étant équivalent,
du caractère impitoyable , aux
frontières du vice, de la conception,
de l'organisation, de la supervision
et de l'application du crime. Le plus
souvent, cependant c'est au niveau de
l'application que se mesure et se détermine
le succès ultime. Comme spécifié
ci-dessus, une grand partie des exécutants
du Génocide arménien étaient
fortement motivés dans leur implication.
La frustration, une agression déplacée,
la rage, la cupidité, et dans
une moindre mesure un conditionnement
culturel pour une violence primordiale,
furent tous les facteurs qui convergèrent
vers une impulsion atavique pour le
génocide.
Une
brève revue du modus operandi
de Salihzéki, le mutasarrif de
Deir Zor et suprême organisateur
du Génocide arménien complémentaire
dans les déserts de Mésopotamie
en été 1916, donne un
aperçu de ce type de motivation.
En plusieurs occasions, il réprimanda
ses subordonnés tchétchènes
pour leur inaptitude dans l'art de la
cruauté et du vice. A Deir Zor,
par exemple, il réunit ses exécutants
tchétchènes et leur recommanda
de ne pas éprouver de pitié,
et de ne pas céder aux tentatives
de corruption en vue d'aider quelques
Arméniens à échapper
à leur sort. Il monta ensuite
sur son cheval, saisit un enfant arménien
de deux ans dans une tente à
proximité, l'amena aux Tchétchènes
et leur dit :
"
Même cet innocent - si tant est
qu'on puisse considérer un rejeton
arménien comme innocent, car
ces fils de chiens ne sont plus innocents
- nécessite d'être tué,
exactement comme les autres de son âge,
sans pitié. Un jour viendra où
ils vont se relever, dénicher
les responsables des tueries des Arméniens,
et se venger. " Il fit ensuite
tournoyer l'enfant en l'air plusieurs
fois et le jeta violemment par terre.
Une
autre fois, il réprimanda sévèrement
ses aides tchétchènes
et arabes, leur interdisant strictement
de relâcher ou de laisser échapper
un Arménien.
"
Qu' avez-vous besoin de pots-de-vin
? Si ce que vous voulez est de l'argent,
tuez-les d'abord, ensuite vous aurez
tout leur argent et leurs biens. Tuez-les
d'abord, et ensuite vous aurez tout
ce qu'ils possèdent... Vous êtes
en train de rendre un service à
l'Empire, donc votre travail est légitime.
Vous avez accompli votre mission, mais
soyez conscients du fait que si l'un
de ces fils de chiens, si c'est un petit
garçon, reste en vie, il se vengera
un jour. "
Salihzéki
comptait presque entièrement
sur les tribus tchéchènes
qui vivaient principalement à
Séfa, au sud-est de Ras-Ul-Ain,
et qui à l'origine avaient émigré
du Caucase. Les chefs des gouvernements
locaux de Ras-Ul-Ain, Suvar, Shedadiye
et Hassiche, étaient ses plus
proches complices. En outre, il avait
co-opté le député
de Deir Zor, le gouverneur d'Aneh, les
commandants Salahaddin et Ali Bey, le
colonel de cavalerie Hasan, le lieutenant
de cavalerie Tevfik, le commandant de
la garnison de Deir Zor, Mustafa, le
chef de la police d'Aneh, Bedri, l'inspecteur
de police Balsidi et une dizaine d'officiers
de police.
Cette
sous-culture de barbarie primordiale
joua tout son rôle en plusieurs
occasions, qui ont été
rapportées par des témoins
oculaires étrangers et des survivants
arméniens. Un chroniqueur allemand
relate, par exemple, comment des gendarmes
firent sauter les cerveaux d'enfants
arméniens qui traînaient
derrière les convois en écrasant
leur boîte crânienne.
Voici
trois exemples supplémentaires
des champs de la mort de la célèbre
Gorge Kemach près d'Erzincan,
témoignages fournis par deux
survivants arméniens :
1. 25
mai 1915
" Dans la plaine près du
col de Kemakh, où nous avions
campé, les gendarmes entrèrent
dans la tente d'un voisin, et en vue
de se saisir de la jolie fille Armine,
ils tuèrent son père,
son frère et deux jeunes neveux.
Armine fut emmenée et ne revint
plus jamais."
YEPRAKSI YANIKIAN
2.
26 mai 1915
" Dans ce même endroit, en
plein jour, deux gendarmes tuèrent
avec leurs baïonnettes Aram Kasparian,
et emmenèrent sa jolie femme.
Son enfant de 6 ans qui pleurait et
criait sur le corps saignant de son
père, fut emmené et une
longue baguette de bois fut enfoncée
dans son rectum et il fut brandi au
peuple dans cet état avec les
cris de : 'Voici votre drapeau !'
YEPRAKSI YANIKIAN
3. 26
mai 1915
" Dans ce même endroit, plusieurs
gendarmes prirent de force le jeune
garçon Mesrob, âgé
de 5 ans, des bras de sa mère,
ils le clouèrent sur un cadre
en bois par les yeux, les mains et les
pieds, puis ils l'élevèrent
au milieu du peuple avec les cris de
: 'Voici votre Christ et sa Croix, qu'il
vienne et vous sauve ! "
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Exceptions
insuffisantes de Turcs bienveillants
L'ampleur
du nombre de victimes du Génocide
arménien témoigne du succès
de l'entreprise fatale du régime
Jeune Turc Ittihadiste. Mais il témoigne
aussi de la faible quantité de
" Justes " Turcs, dont l'implication
en plus grand nombre aurait pu faire
une différence dans le résultat
du Génocide. Il est vrai que
les ordres étaient stricts, et
que de graves menaces pesaient sur de
telles implications, mais les marges
de manoeuvre et les possibilités
de circonvenir à de tels ordres
étaient également considérables.
Les clivages religieux et les incitations
du temps de guerre contre les Arméniens,
conduisirent à l'empêchement
de l'engagement d'un nombre significatif
de Turcs d'intercéder ou d'aider
directement les Arméniens destinés
à l'extermination.
Néanmoins,
il est tout à fait juste que
lorsqu'une minorité négligeable
essaie d'aider, de telles personnes
devraient être distinguées
et reconnues pour leur bénévolat
courageux. Les cas ci-dessous ne sont
que des exemples. Ils ne sont pas les
seuls. L'un de ces exemples est à
la fois frappant et émouvant.
Selon l'information fournie par le Patriarcat
d'Istanbul lors de l'Armistice, un certain
nombre de bons officiers militaires
turcs prirent la peine d'amener avec
eux et de remettre au Patriarche plusieurs
filles et garçons orphelins,
des lointaines provinces de Harpout,
Alep et Diyarbekir, courant de grands
risques personnels pour eux-mêmes.
Dans un autre cas, un colonel a osé
transporter immédiatement onze
petites filles à Istanbul et
les a remises au Patriarche. A Arabpunar,
un major turc qui parlait allemand dit
à une employée allemande
de la Compagnie des Chemins de Fer de
Bagdad que lui et son frère avaient
sauvé chacun et amené
avec eux une petite Arménienne
qu'ils avaient trouvée dans les
rues de Ras-Ul-Ain. Il critiqua fermement
les autorités pour les atrocités
" que notre Coran interdit "
dit-il.
Le fait
pour les enfants arméniens d'avoir
été victimes d'un génocide
a également une signification
et une conséquence pour les enfants
survivants. Des milliers d'entre eux
ont été adoptés
comme fils et élevés en
tant que Turcs. Des dizaines de milliers
de fillettes et de jeunes filles ont
de même été absorbées
dans la nation turque, comme servantes,
concubines pour harems, ou épouses
légitimes après conversion
à l'Islam. Cependant beaucoup
d'autres
languirent dans des orphelinats. Le
sujet des enfants arméniens victimes
de génocide, pour être
complet, nécessite d'être
exploré plus à fond, en
ce qui concerne leur statut final de
victimes, c'est-à-dire les différences
de sort entre les orphelins survivants,
concubines, mariées, ou convertis.
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Texte anglais envoyé par
le CRAG (Campagne pour la Reconnaissance
du Génocide Arménien) http://www.24april.org
et traduit par Louise Kiffer |
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