Le Dréors - Le Château

 Le château du Dréors (ou Dréorz).


Histoire du château du Dréors (ou Dréorz) à Priziac.

Un premier château érigé au Dréors fut détruit pendant la guerre de succession (La guerre de Succession de Bretagne ou guerre des deux Jeanne, qui dura de 1341 à 1364, est l'une des guerres secondaires qui ont eu lieu au cours de la guerre de Cent Ans). La famille Le Scanff édifia un second château à la fin du XIVe siècle en remplacement de précédent. Ses grandes chambres et ses vastes salles, aux cheminées monumentales, ses fenêtres à croisillons, sa tourelle très haute qui dominait le pays, ses lucarnes sculptées en faisaient une des plus belles demeures seigneuriales de l'époque.

La seigneurie du Dréors était une juveigneurie de Guémené, fondée en faveur d'un cadet des Beaumetz. Elle jouissait des droits de haute, moyenne et basse justice. Les armes du Dréors étaient celles de Beaumetz : « de sable à la croix engreslée d'argent ». Dès avant 1362, la famille de Beaumetz était fondue dans celle des Le Scanff, la lignée mâle s'étant éteinte. Les Le Scanff, furent au XVe siècle et au XVIe siècle, chambellans, écuyers et pensionnaires des ducs de Bretagne. Par suite d'alliances, la seigneurie du Dréors passe aux familles Talhouët Kerservant (1591) et de Volvire (1632). Ces derniers la vendent aux Lopriac (1684)

La seigneurie possédait un droit de basse, moyenne et haute justice. Propriété successive des familles Le Scanff ou Le Scauff (en 1363 et en 1448), Talhouët de Kerservant (en 1591), Volvire (en 1660), Lopriac (en 1684), Kerhoent (jusqu'à la Révolution). En 1827, le logis, la chapelle privée et le colombier sont encore debout. L'ensemble tombe en ruine au début du XXème siècle.

Alain Le Scauff, sire du Dréorz, mourut en 1424, laissant son manoir à son fils Charles. Alain, héritier de celui-ci, rendit aveu, en 1466, à Louis de Rohan et laissa le Dréorz à Jehan Le Scauff, mari d'Anne du Cormier. Il mourut en 1496, et, en 1517, son fils Pierre faisait hommage à Louis de Rohan pour son manoir et « herbergement » du Dréorz. En 1531, mourut Gilles Le Scauff, et son fils Pierre fournit aveu, en 1540, au sire de Guémené pour ses domaines qui se composaient des manoirs du Dréorz, de Morgant, de Ménézorven, de seigneuries sur les manoirs de Keroual, de Brecelien, de Kerlen et de Coëteven, plus un bon nombre de tènements et de chefsrentes. Pierre Le Scauff était mort en 1566, et son fils Tristan rend aveu, cette même année, au sire de Guémené. Yves Le Scauff, fils et héritier de Tristan, dans son aveu de 1580, déclare que « à cause de la terre et seigneurie du Dréorz, il a cour et juridiction haute, moyenne et basse, et peut faire punir les délinquants jusqu’à extermination de vie inclusivement, qu’il a patibulaire à trois posts et piliers ». En 1593, le Dréorz était en la possession de Nicolas de Talhoët, sieur de Kerservant, Lisleho, Grand-Bois, Tremedern, et le Dréorz ; en 1661, il appartenait à Hélène de Talhoët, comtesse du Bois-de-la-Roche et dame de Crémenec ; enfin, en 1748, i1 était la propriété de Guy-Marie de Lopriac et passait à sa fille Félicité de Lopriac, femme de Louis-Joseph de Kerhoënt, qui en rendait aveu en 1777 (M. L. Galles). Puis en 2020 les Le Guenic prennent possession du domaine.

Extrait des études de géographie féodale : les arrières-fiefs de la seigneurie de Guémené :

La seigneurie du Dréortz à Paule,
possédée également par les Le Scanff (de Priziac).

En faisant l'histoire des le Scanff, seigneurs du Dréortz (en Priziac) qui, dès 1409, possédaient deux des seigneuries indiquées , celles de Brécilien et du Dréortz en Paule, nous retrouverons les Raguenel de la Bellière. La résidence des le Scanff était le château du Dréortz, en Priziac, ramage et juveigneurie de Guémené-Guégant. Leurs armes, qui ont été de tout temps le sceau de la juridiction de Paule, « de sable à la croix engreslée d'argent » étaient celles des Beaumez dont ils étaient issus, ainsi que le prouve l'acte suivant extrait de Dom Morice (Pr. I, page 1041) [Note : Une note de la Généalogie de la maison de Talhoët, par M. de Boislisle, p. 359, note 5, donne des détails sur cette famille qu'elle appelle : Lescanff. L'examen attentif des documents anciens et des signatures qui y sont apposées ne permet pas d'accepter cette orthographe. Le nom doit s'écrire le Scanff].

 « Robert de Beaumez, chevalier, sieur de Quemené-Guégant [Note : NOTE SUR LES BEAUMEZ OU BEAUMER. Puissante famille picarde, originaire de la paroisse de Beaumetz, département de la Somme, issue disait-on des comtes de Ponthieu. — Hugues de Beaumer se croise en 1198, et il eut de son mariage avec Béatrix de Guines, fille d'Arnoul le Grand, Comte de Guines, de 1142 à 1169, et de Mahaut de Saint-Omer : Gilles de Beaumer, châtelain de Bapaume, qui épousa Agnès de Coucy, fille de Raoul Ier, sire de Coucy, 1191, et d'Alix de Dreux, sa seconde femme, fille de Robert Ier, Comte de Dreux, 1137-1184 (3ème fils de Louis-le-Gros, roi de France). Entre autres enfants naquirent de ce mariage : Robert de Beaumer qui vint à la cour du duc de Bretagne, Pierre de Dreux, surnommé Mauclerc, lui étant doublement parent, puisque celui-ci avait pour mère Yolande de Coucy, fille de Raoul Ier, sire de Courcy. Il y épousa : 1° Amice de Beaumortier, fille de Geoffroy de Beaumortier, seigneur d'Oudon ; 2° Mabille de Rohan, fille d'Alain V, vicomte de Rohan, et d'Aliénor de Porhoët. Elle reçut en partage, le 29 septembre 1251, la seigneurie de Guémené-Guégant, et celle de la Roche-Périou. Leur petit-fils, Thomas de Beaumer, seigneur de Guémené, partisan de Charles de Blois, se vit, en 1354, enlever le château de Guémené par le roi d'Angleterre qui le donna à Roger David, capitaine anglais, marié à Jeanne de Rostrenen, veuve d'Alain, vicomte de Rohan. Sa fille, Jeanne de Baumer, épousa Jean, sire de Longueval ; elle eut Guémené qu'elle vendit en 1377 au vicomte de Rohan (Extrait du portefeuille des Blancs-Manteaux de la bibliothèque nationale)], en icelui temps etc., l'an 1276. Laquelle lettre estoit scellée du sceau en l'imprimé duquel avoit un homme d'armes à cheval d'une croix engrellée. Amprès quoy pour faire information du dict sceau, pour valloir aud. Messire Jean, ce que estre devra, présenta ledict Forestier, etc., au dit nom, scavoir est Jouan Cremeur, Jean le Picart, Guillaume le Vesle et chacun, lesqueux et chacun en furent enquis et recordèrent par leurs serments qu'ils avoient autrefois veu en la cour et chastellenie, et faire information dudict sceau, et que l'en avoit trouvé que c'estoit le sceau dudit Beaumé. Item présenta Jean de Quermérien lequel recorda par son serment qu'il avait ouy dire que c'estoit le sceau dudict Beaumé. Item présenta Eon Roberd, lequel recorda par son serment qu'il vid autrefois apparoir une lettre en la cour de céans, laquelle estoit scellée d'un tiel sceau et que l'en disoit que c'estoit le sceau des prédécesseurs de Monsieur de la cour de céans, et Allain le Scanff qui est des juveigneurs porte en ses armes une croix engreslée. Pourquoy fut ceste présente relation délivrée aud. messire Jan pour luy valoir ce que estre debvra. Faict aux généraux pleds de Guermenec-Guégant le traiziesme jour de septembre, l'an mil quatre cents quatorze ».

 ALAIN Ier LE SCANFF, seigneur DU DRÉORTZ (en Priziac), celui-là même dont il est question dans l'acte ci-dessus, avait dès 1409 la partie de Paoul appelée seigneurie du Dréortz en Paoul. Un aveu (original sur vélin) lui est rendu pour le manoir de Keriergars, eu Paule, le 26 aoust 1409 (archives de la seigneurie de Paule). Un extrait généalogique, donné par l'auteur de la Généalogie de Talhoët, le dit fils d'autre N. le Scanff, seigneur du Dréortz, de N. de Montfort, et fixe sa mort à l'année 1424. C'est bien lui qui figure dans l'état de la maison du duc Jean V dressé par le duc de Bourgogne (son tuteur), le 13 janvier 1403 : On y trouve : « Simon de Montbourchier [Note : Simon de Montbourcher, seigneur du Bordage, avait épousé, en 1392, Typhaine de Champaigné] et Alain le Scanff, escuiers d'escurie à servir par quartiers, et auront bouche à cour, et chacun d'eux deux chevaux à livrées, et VI l. X s. par mois (Dom Morice, Pr. II, 737) ». Clémence de Lespervez, dame du Dréortz, qui fait une acquisition en Paule, au village de Kereffaut, le 20 mai 1435 (Inventaire des titres de la seigneurie de Paule, du 20 octobre 1604), fut-elle la femme d'Alain I le Scanff ? C'est ce qu'il ne nous appartient pas d'affirmer. Les enfants connus d'Alain furent : 1° Charles qui suit ; 2° Henry le Scanff, frère juveigneur de Charles, se trouve de 1426 à 1428, parmi les gens d'armes et de trait, avec les Kermellec, les Angier, les Coëtquen, etc. En mai 1427, il est capitaine des archers du corps.

Messire CHARLES LE SCANFF, chevalier, seigneur DU DRÉORTZ en Priziac, de Brécilien, et du Dréortz en Paoul, fut écuyer du duc de Bretagne Jean V, qui lui donna en récompense de ses services, par acte du 29 octobre 1423, les biens de Morice de Plusquellec [Note : Fils d'Alain de Plusquellec, chevalier, chambellan du duc, et de Marie de Launay] confisqués pour rébellion ; mais le 27 mai 1425, restitution en fut faite par le duc avec compensation donnée à Charles le Scanff. (Voyez les longues pièces à ce sujet dans Dom Morice, Pr. II, p. 1141 et p. 1172). Ce seigneur du Dréortz et de Paule fut un personnage considérable : dans un compte de mai 1427, il figure parmi les chambellans du duc. En 1430, il est capitaine de Vannes, se voit au nombre des pensionnaires du duc, tous de haut parage (Pr. II, 1231). Il se trouve également dans des comptes de 1434, avec les seigneurs qui reçoivent des étrennes du duc, entre autres avec le sire de Rostrenen (Pr. II, 1261 et 1270). Il acquit la partie de la seigneurie de Paoul que possédait Jan Raguenel, vicomte de la Bellière, ainsi que l'apprend l'extrait suivant du précieux inventaire des titres de la seigneurie, en 1604. « Acquest que messire Charles le Scanff seigneur du Dréortz faict d'avecq Tristan de la Lande, procureur de noble et puissant Jan Raguenel, vicomte de la Bellière de, tout à f. le dit sieur vicomte pouvoict prétendre tant en domaines que autres biens, en la paroisse de Paule que plus à plain est raporté par ledit acte dapté du dixneufviesme de décembre l'an mil quattre centz vingt et neuf. — Signé E. du Dresnay. Ratification de messire Jan Raguenel, vicomte de la Bellière, de la vandiction faicte par escuier Tristan de la Lande des terres sizes en la paroisse de Paule à messire Charles le Scanff, dapté du deuxième jour de juillet l'an mil quattre centz et trante, signé Jan Raguenel ». Le même inventaire nous indique encore : « Procure auctroyée par le sieur vicomte de la Bellière [Note : NOTE SUR LES RAGUENEL, VICOMTES DE LA BELLIERE. Raguenel : Écartelé d'argent et de sable, au lambel de l'un en l'autre (sceau 1283) alias : contrécartelé de la Bellière. Jan Raguenel, dont il est ici question, était descendant de Robert Raguenel, du combat des Trente. Il était fils aîné de Jan Raguenel, vicomte de la Bellière, et de Jeanne de Malestroit. Il recueillit tout l'héritage paternel, c'est-à-dire la Bellière, la Couppaye, Chateloger, etc. Il se prononça contre la trahison des Penthièvre en 1420, passa une nombreuse revue (Pr. II, 1009) et fut chambellan du duc (ib. 1067, 1084, 1223). Il assista aux États de Nantes en 1425, accompagna Arthur de Richemont quand il reçut l'épée de connétable à Clisson, en 1426, et fut fait prisonnier près du Mont-Saint-Michel, en 1427 (H. 1. 496, 495, 501). Il fut armé chevalier au siège de Saint-Célerin par le connétable de Richemont, en 1431. Il contracta alliance avec une Malestroit, mais ne laissa pas d'enfants et mourut le 25 novembre 1436 (Lob. II, 1039). D'après les dates, c'est bien lui qui, ayant pour mandataire Tristan de la Lande, vend, en 1429, la seigneurie de Paule proprement dite à messire Charles le Scanff, déjà possesseur de partie de ce fief] à escuier Tristan de la Lande [Note : NOTE SUR TRISTAN DE LA LANDE. D'azur à trois écussons d'argent, à la cotice brochante (sceau 1365). Tristan de la Lande est un grand personnage de l'époque. Il fut témoin ainsi que dame Béatrix de la Lande, au Testament de Jeanne de France, duchesse de Bretagne le 6 août 1406 (Dom Morice, Pr. II, 775), puis au consentement donné par le duc au mariage de sa soeur avec le jeune vicomte de Rohan, 10 avril 1407 (Dom Morice, Pr. II, 784). En 1418 et 1424, capitaine de Redon, il le fut ensuite de Nantes (Pr. II, 1166). En 1417, 1420, 1427 « grand Maistre d'hostel » et gouverneur des finances. En 1420, dans la ligue des seigneurs pour le duc contre les Penthièvre figure Tristan de la Lande (ib. Pr. II, 1060). — Exécuteur testamentaire au testament de Richard de Bretagne, comte d'Etampes, en 1425 (ib. 1171). Grand maître d'hôtel, et l'un des commissaires nommés par le duc Jean V pour la réformation des finances de la justice, 23 janvier 1428 (Dom Morice, Pr. II, 1217). Il figure aussi dans les étrennes de l'an 1428 (ib. 1224) parmi les pensionnaires du duc, en 1430 (ib. 1231) ainsi que messire Charles le Scanff, capitaine de Vannes. — Dans les comptes de 1434 à 1442, tous les deux figurent également (ib. 1270). Tristan de la Lande, seigneur de Guignen, épousa : 1° MARGUERITE DE BRUC, fille de Jean de Bruc, seigneur de la Bouteveillaye, vice-chancelier de Bretagne, et de Lucie de Coëtlogon (du Paz, p. 91) et dont la soeur, Isabelle de Bruc, fut mariée par le duc de Bretagne avec Jean de Malestroit, seigneur d'Oudon. 2° JEANNE DE TEHILLAC, vers 1415 : les enfants issus de ce second mariage prirent le nom et les armes de Téhillac] pour vendre terres aud. sieur apartenant dapté du vingt sixième jour de mars l'an mil quattre centz vingt et six, signé Jan d'Andigné ». Les derniers titres (sur parchemin) où paraît Messire Charles le Scanff, seigneur du Dréortz et de Brécilien, sont de 1448, année où il mourut. Il avait épousé, d'après le manuscrit de la réformation de 1668 (v. article Boutiez) JEANNE BOUTIER, fille de Jean Boutier [Note : BOUTIER : D'hermines à 4 burelles de gueules (Sceau 1200), et gironné d'hermines et de gueules de six. (Sceau 1370)], seigneur de Châteaudacy, et d'Aliènor de la Jumelière, et petite-fille de noble écuyer Jean Boutier, seigneur de Chateaudacy, et de Jeanne de Saint-Gilles. Aliénor de la Jumelière était fille de noble et puissant Guillaume de la Jumelière, seigneur de Martigné Briand, la Guerche et Blaison, et de Marquise de Blossac. Devenue veuve, Jeanne Boutier épousa en secondes noces Jean de la Chataigneraie, seigneur de Marzan. De son mariage avec messire Charles le Scanff naquirent Alain qui suit, et Fleurine le Scanff qui fut la femme de Guillaume de Saisy, seigneur de Kerampuil, lequel était fils aîné de Guillaume de Saisy, seigneur de Kerampuil, et de Méance de Trémédern. (Voyez le P. le Laboureur, page XV des généalogies de l'Histoire du maréchal de Guébriant).

 ALAIN II LE SCANFF, seigneur DU DRÉORTZ, en Priziac, et de Brécilien, en Paule, eut pour curateur et garde noble, escuier Henry le Scanff, frère de Charles le Scanff, son père, ainsi qu'il est prouvé dans un acte « dapté du second jour de janvier, l'an mil quattre centz cinquante et six, relaté dans l'inventaire des titres du 20 octobre 1604 ». Un autre acte des archives de la seigneurie de Paule, apprend que dès 1450 Alain le Scanff avait pour femme THOMISE DE KERAUTEM [Note : DE KERAUTEM : De gueules à trois fasces d'argent – Alias : surmontées d'un lambel (Sceau 1421). Paroisse de Carnoët]. Parmi les titres qui le concernent se trouve un compte original sur papier, de mai 1475, qui commence ainsi : « ceste le livre par lequel je Chrestien Corvest, receveur et officier de noble homme Alain le Scanff, seigneur du Dréortz, de Brécilien, et de Château d'Assis, des receptes et mises par luy faictes au nom de môd seigneur ez parrouesses de Paoul et Glomel en lad. seigneurie de Brécélien, dampuis le premier jour de may l'an mil quatre cent soixante et quinze jusques au premier jour de may dilecques ensuyvant ainsi compté pendant un an atier ». Ce compte de la seigneurie de Brécilien comprend les rentes et redevances des villages de « Brécélyen, Kergroes, Kerloeguennic, Kergoasou, Kersac'h, Toulhalec, Chastellaouenan, Guerfuloc'h, Kerenep, Keranturcquet, Sant-Donoezon, Kerbrunet, Kerdezel, Stangandour, Lansalaiin, Saint-Eloy, Kereffaut, Coëtfarigou, Kerduel, Botlan, le bourg de Paoul (sept tenues) Menez Brélivet, Kerlefvras ». Tous ces villages qui forment une grande partie de la paroisse de Paule, constituaient autrefois la seigneurie de Brécilien, et montrent qu'elle était importante. A cette même date de 1475, est mentionné dans l'inventaire des titres « Contract faict par nobles homs Allain le Scanff seigneur du Dréortz, et missire Charles de Boutteville, recteur de l'église parochialle de Paul en son nom et stipulant pour ses paroissiens du dit Paul et fabricques de la chappelle de Monseigneur Saint-Siforien sise en ladite paroisse de Paul [Note : Cette chapelle de Saint-Symphorien, tout près de Brécilien, n'existe plus : sa fontaine, qui était ornée d'un fronton monumental avec la statue du saint, est également démolie, comme dans ces contrées toutes choses le sont] par lequel est deub quinze soubz de rante par chacun an le lendemain du jour de la feste de monsieur Saint-Siforien à cause de ladite chappelle, et autres choses mentionnez aud. contract, dapté du vingt et quattrième jour d'aougst l'an mil quattre centz soixante et quinze. Signé Loys Fraval passe ». (Cotté dans l'inventaire de 1664 d. d. c.). Je trouve encore pour Alain le Scanff : « acte de donnason faicte au sieur du Dréortz par noble homme Michel le Pennec [Note : Michel le Pennec fut maître d'hôtel de la duchesse de Bretagne, en 1480. Il était fils de Jean le Pennec, seigneur de Kerdouro, et de Perrine de Bogat, et mari d'Aliette Guillart, celle-ci fille de Philippot Guillart et d'Anne de Carné (P. le Laboureur, p. 72). Olivier de la Châtaigneraye était frère de mère d'Alain le Scanff, dont la mère, Jeanne Boutier, s'était remariée à Jean de la Châtaigneraye], seigneur de la Moignac et Kerdouro, ou nom et comme curateur de 0llivier de la Chataigneraye, pour certaines rantes deubs sur Kerlevras en Paul, dapté du dernier jour de juign, l'an 1478 ». Alain le Scanff mourut en 1488 ayant pour fils Jéhan le Scanff qui suit.

 

JÉHAN LE SCANFF, seigneur DU DRÉORTZ et DE BRÉCILIEN, est dit expressément fils d'Alain le Scanff, dans un titre des archives de Paule, du 20 juillet 1502. Ce fut sans doute lui qui fit alliance avec l'héritière des Vaux (p. de Dingé, évêché de Saint-Malo) [Note : DES VAUX : Châtelains dudit lieu, paroisse de Dingé, évêché de Saint-Malo. D'or à trois merlettes de sable (Sceau 1302)]. Il y a deux titres concernant Jéhan le Scanff. En 1498, il était remplacé par Gilles qui suit, son fils vraisemblablement.

 

GILLES LE SCANFF, seigneur Du DRÉORS, de Château d'Assis et de Brécellyen (qualifié ainsi dans les actes de 1498 et 1500), épousa, d'après les titres mêmes de la seigneurie de Paule, ANNE DU CORMIER. La date de la mort de Gilles est parfaitement déterminée dans l'aveu de Paoul au Roi, le 6 mai 1540 : « Les dites choses (y est-il dit) advenues au dit le Scanff par succession de feu Gilles le Scanff, son père, décédé neuf ans sont ». Il mourut donc en 1531, laissant d'Anne du Cormier qui lui survécut, Pierre qui suit :

 

PIERRE LE SCANFF, fils de Gilles, est qualifié dans ce même aveu du 6 mai 1540, seigneur du Dréortz, du Pélinec, des Vaux et de Brécilien. Cet acte « est fait et gréé en la maison du Dréortz, en la salle d'icelluy, le jeudy sixième jour de May, mil-cinq-cent-quarante, ainsi signé Aleno, passe et Louvel passe ». Et comme dans cet aveu, Pierre le Scanff « institue son procureur, Tristan le Scanff, son fils, avec pouvoir exprès quand à ce et à toutes autres choses, » etc., cela prouve que son mariage remontait à plus de vingt ans. Il avait épousé JEANNE DU JUCH, fille de haut et puissant Hervé du Juch, seigneur de Pratanroux, capitaine de Quimper, mort le 4 septembre 1501, et de Marie de Guernarpin qui mourut le 3 février 1539 [Note : DU JUCH : D'azur au lion d'argent, armé et lampassé de gueules (Sceau 1365). Devise : LA NON PAREILLE]. Jeanne du Juch était soeur de Raoul du Juch qui décéda en 1534, et dont la femme fut Jeanne de la Chapelle, fille d'honneur de la duchesse Anne, mariée, en premières noces, au château de Blois en présence de Louis XII et d'Anne de Bretagne, à Jean III sire de Rosmadec. Noble chevalier Morice de Guernarpin, seigneur de Liscuit (en Laniscat), était alors qualifié seigneur de Paule [Note : Cette partie de la seigneurie de Paule possédée par les seigneurs de Liscuit, se nommait seigneurie de Liscuit en Paule, comme celle possédée par les le Scanff se nommait seigneurie du Dréortz en Paule], et pour preuve voici le titre original que nous avons du 26 mai 1470 : « En nostre cour à Callac, le comparant connait tenir à ligence et à foy sans aucun devoir de rachat, sous la seigneurie de noble chevalier messire Maurice de Guernarpin, seigneur de Liscuit, à cause de sa seigneurie de Paule, être homme et sujet du dit seigneur de Liscuit, etc. ». Sa nièce et héritière, Marie de Guernarpin, fille de feu Jean de Guernarpin et de Jeanne Provost, fut mariée, le 11 mars 1481, à messire Hervé du Juch, seigneur de Pratanroux, fils de feu Henry du Juch, chevalier seigneur de Pratanroux, chambellan et conseiller du duc, et de Marguerite du Juch. Devenue belle-mère de Pierre le seigneur du Dréortz, elle fit passer à Jeanne, sa fille, cette seigneurie dite « de Liscuit en Paule » qui est toujours mentionnée dans les actes comme venant d'elle. Nous trouvons dans l'inventaire de titres de 1604 : « Contract d'eschange entre nobles homs Pierre le Scanff, seigneur du Dréortz, et noble et puissante dame Marie de Guernarpin, dame de Liscuitz, pour lequel led. seigneur du Dréortz a baillé à la dite damoiselle la pièce seigneurye et juridiction du Rouvray a luy apartenante estant soubz le franc reguere de Dol en la paroisse de Kerfantain, et en retour et récompense ladite damoiselle a baillé aud. seigneur du Dréortz touttes et chacune des pièces, héritaiges et rantes de quelque espèce que ce soict avecque toutte la juridiction court et seigneurye qu'il a et lui apartient en la paroisse de Paule, appelée le fief et juridiction de Liscuitz, tenu prochement soubz la court et juridiction de Rostrenen, passé par la court de Moncontour dapté du dimanche vingt et neufvième jour d'octobre l'an mil cinq centz trante et six. Signé G. le Forestier passe ; G. de Gaudemond passe, et icelle cotté C. C. t. ». C'était trois ans avant la mort de la dame du Juch. Parmi les titres originaux, citons : 1) un aveu du 19 avril 1534, du manoir de Keriergartz « par M. Pierre Jourdan, escuier, sr. de Keriergartz, à cause de la seigneurie de Brécilien » ; 2° Une transaction sur procès, du 4 décembre 1537, pour Kerloguennic et Kereffaut que fait noble homme Pierre le Scanff, seigneur du Dréortz, Pellinec, Château d'Assis et Bressilien ; 3° Aveu pour Kerouller, du 7 mai 1540, en la Cour et seigneurie du Dréortz en ses juridictions de Paoul, sous noble homme Pierre le Scanff, seigneur du Dréortz, de Brécillien, à cause des dites juridictions de Paoul ; 4° Un aveu du 6 mai 1540, pour Kergroas en Paoul, sur vélin, avec un sceau pendant portant la croix engreslée des le Scanff ; 5° Une déclaration passée le 10 avril 1538, et aveu du manoir de Keriergartz et dépendances par M. Maurice le Dimanach, sr. de Keriergartz, sous ligence, à foy, sans devoir de rachat de noble homme Pierre le Scanff, seigneur du Dréortz, à cause de la dite seigneurie de Brécellien « outre connoit le dit Dimanach tenir et qu'il tient ligement et à foy sans devoir de rachat sous le dit sr. du Dréortz, et damoiselle Jehanne du Juch, sa compagne, à cause d'elle, à raison de la juridiction de Liscuit en la paroisse de Paoul, les héritages qui ensuivent au bourg de Paoul, à Keralliou à Saint-Éloy, à Kerléran » ; 6° Une transaction du 1er juin 1559, passée entre noble homme Pierre le Scanff, et Jeanne du Juch, sa compagne, sr. et dame du Dréorz, au sujet de terres dépendantes de Kervoazou, annexées au lieu et manoir de Brécilien. L'acte se termine ainsi : Ce fut fait et le gré pris en la salle du dit lieu du Dréortz en Prisac, le 1er jour de juin, l'an 1559, signé Pierre le Scanff. En l'an 1527, Pierre le Scanff figurait au rang des plus considérables seigneurs de la contrée. On le trouve dans la curatelle de Louis de Rohan, sire de Guémené, le 29 juillet 1527, « afin de créer et d'instituer pour garde et curatrice noble et puissante dame Marie de Rohan, mère du sire de Guémené, avec les autres membres du conseil de tutelle, les sires de Rieux, d'Harcourt, de Malestroit, de Laval sire de Châteaubriant, de Maure, du Chastel, de Guémadeuc ; Charles du Quellénec, vicomte du Fou tous proches parents ; et les seigneurs du voisinage, qui sont : Pierre de Tinténiac, seigneur de Quimerc'h ; Louis de Bouteville, seigneur du Faouët ; Raoul du Juch, seigneur de Peillac et de Pratanroux ; Alain de Tyvarlen ; Tristan de Carné ; Alain de Guengat, capitaine de Brest ; Pierre de Talhoët, seigneur de Langueouez ; Louis de Ploeuc ; Pierre le Scanff, seigneur du Dréortz ; Guyon de Talloët, seigneur de Crémenec ; François Esmes, seigneur de Kerservant, et plusieurs autres » (D. Morice, Pr. III, 972). Pierre le Scanff mourut en 1565 et eut pour successeur son fils aîné, Tristan, qui suit. Pierre, frère juveigneur de Tristan, est seulement qualifié seigneur de Kerloaguennic, et est dit y demeurant, dans des actes des 13 et 14 janvier 1588, où aveu lui est fait pour les villages de Keranturquet, Kervoazou, Kerdahel, Castellaouénan, Kerbrunec, Kersarc'h, Kerfuloc'h, Kerennep, Goazfarigou. Il est encore question de lui dans un contrat de vente du manoir de Kerlévras, en Paule, consenti par noble homme M. Moricze le Dimanach, seigneur de Kerlévras, à escuier Pierre le Scanff, sr. de Kerloaguennic, et y demeurant, le 11 juin 1590, « et fut faict et le gré prins aud. lieu et manoir de Kergloaguennic, en la salle haulte dud. lieu. Et signent Pierre le Scanff et M. Dymanach » (Original sur papier). Je ne sais rien de plus sur Pierre le Scanff qui a dû rebâtir, en 1575, le manoir de Kerloguennic, suivant la date qui s'y trouve extérieurement. Il est probable qu'il périt dans les guerres de la Ligue. Marie le Scanff, fille de Pierre le Scanff et de Jeanne du Juch, épousa en 1546 (suivant le manuscrit de la réformation de 1668), Guillaume Boutier, sr. de Seven et de Launay-Blot, lequel était fils d'Olivier Boutier, seigneur de Séven et de Launay-Blot, et de Marguerite de la Blanchardays [Note : Marguerite de la Blanchardays, fille de Girard Blanchard, sr. de la Richardière, et de Marie de la Touche (manu. de la réformation)] et petit-fils de Guillaume Boutier, sr. de Launay-Blot, et de Jeanne de Rouvray ; lequel Guillaume était frère de Jeanne Boutier, femme, comme il est dit plus haut, de messire Charles le Scanff, seigneur du Dréortz et de Brécillien. Du mariage de Marie le Scanff avec Guillaume Boutier naquit : Haut et puissant Gilles Boutier, seigneur de Chateaudacy, Launay-Blot, la Grimaudais, Chateaufort, capitaine de cent hommes d'armes, gouverneur de Corbeil, qui épousa Claude de Villetout. (Extrait de l'arrêt du 24 août 1669).

 TRISTAN LE SCANFF, seigneur DU DRÉORTZ, Pélinec, Brécilien, ainsi qualifié dans des actes des 3 mars 1567, et 29 janvier 1570, épousa CLAUDINE DE GUER, fille de Charles Ier de Guer, seigneur de la Porteneuve (en Riec), et de Françoise de Kervégant, dame de Kervichart, sa seconde femme. — Claudine de Guer avait pour frères : Charles II de Guer, seigneur de la Porteneuve, époux en 1545 de Marie de Rosmadec, et Yvon de Guer, marié à Catherine de Quélen, le 1er février 1570. Tristan le Scanff était mort au commencement de l'année 1577, d'après un aveu du 29 avril 1577, fait à son fils aîné et successeur, Yves le Scanff qui suivra [Note : DE GUER : D'azur à sept macles d'or, 3, 3, 1, qui est le Sénéchal ; au franc canton d'argent, fretté de huit pièces de gueules. Devise : SINE MACULIS].

 YVES LE SCANFF, seigneur DU DRÉORTZ, Pellinec, Brécellien, etc., dès 1577, comme nous l'avons vu, succédait à son père. Il mourut en octobre 1591, probablement victime des guerres qui bouleversaient alors la Bretagne. On ignore son alliance, mais toujours mourut-il sans hoirs, ainsi que le disent formellement les titres. Françoise le Scanff, sa soeur aînée, lui succéda. Il avait sans doute pour autre soeur, damoiselle Catherine le Scanff, appelée dans l'inventaire des titres de la seigneurie de Paule, la dame de Morgant, qui y figure en 1571 et 1576, pour les appartenances en la paroisse de Paule (Coëtescanff, Kergroix, Botlan, etc.).

FRANÇOISE LE SCANFF devint l'héritière principale et noble de son frère, Yves le Scanff. Elle avait épousé (probablement vers 1564), messire Jean de Talhoët-Kerservant, seigneur de Kerservant et de Crémenec où il demeurait, et dont les armes [Note : DE TALHOET-KERSERVANT : D'argent à trois pommes de pin versées de gueules, au lambel de trois pièces] se trouvent dans le grand vitrail de la chapelle Sainte-Barbe, proche de Crémenec, et les personnages de sa famille représentés comme bienfaiteurs [Note : C'est à tort que dans l'Armorial de M. de Courcy on les met : d'or au chef de sable]. Il était fils ou petit-fils de Jan de Talhoët et de Marguerite de Malestroit [Note : Celle-ci était fille de Jean de Malestroit, seigneur de Kaër, et de Catherine de Rohan]. Jean de Talhoët-Kerservant prit part aux premières campagnes des guerres de la Ligue, entre autres, au siège, de Pont-l'Abbé, en 1589, et mourut en 1591, victime aussi sans doute des guerres qui désolaient le pays. Il eut pour fils et successeur :

 NICOLAS DE TALHOET-KERSERVANT, seigneur de KERSERVANT, du Dréortz, de Crémenec, de Paule, chevalier de l'ordre du Roy, gentilhomme ordinaire de sa chambre, capitaine du ban et arrière-ban de la noblesse de l'Évesché de Cornouaille, dans un aveu de déclaration fourni au Roi sous la court et juridiction de Kerahes (du 1er octobre 1601). Il y est dit que la seigneurie de Paule lui est échue et advenue « de la succession collatéralle par le décès de deffunct messire Yves le Scanff, vivant seigneur de Paulle, et par représentation de deffuncte dame Françoise le Scanff, vivante soeur aisnée du dit Yves, et mère du dit de Talhoët, le debcès du dit Yves advenu sans hoirs procréés de son corps, aud. mois d'octobre, mil cinq centz quatre-vingt unze » [Note : Archives de la seigneurie de Paule]. Nicolas de Talhoët prit comme son père une part importante aux guerres de la Ligue en Bretagne, et figura, à partir de 1594, parmi les capitaines du parti royaliste. La Fontenelle s'empara de son château Crémenec [Note : Ce château était situé au bord de l'Ellé, non loin de Sainte-Barbe-du-Faouët] (en Priziac) qui lui servit de repaire. C'est là, et aussi à l'abbaye de Langonnet, proche de là, et dont il s'était également emparé, qu'il amenait son butin et les prisonniers qu'il retenait jusqu'au paiement de rançons énormes, et qui sortaient des cachots de Crémenec, semblables à des spectres. Kerservant (c'est ainsi que le chanoine Moreau désigne toujours Nicolas de Talhoët) ayant été nommé gouverneur du château de Pont-l'Abbé, le fortifia et en fit un point d'appui pour soutenir Lézonnet et le maréchal d'Aumont dans leurs opérations contre Quimper. Cette ville tomba enfin, et sa reddition fut le signal d'une pacification générale, dont chacun tira profit. Kerservant eut pour sa part le collier de l'ordre du Roi, et un titre de gentilhomme ordinaire de sa chambre, mais peu s'en fallut qu'une vengeance privée ne terminât ses jours d'une façon sanglante. C'était, dit le chanoine Moreau, vers la huitaine du sacre (1595) ; Kerservant tenait encore le poste de capitaine du château de Pont-l'Abbé, quand un gentilhomme nommé Rolland du Guermeur, sr. de Coroarch, tenta de l'y surprendre par vengeance, car il avait pour femme la jeune héritière de Roscanou [Note : Elle seule, ainsi que Claude de Kerlech du Chastel, femme de Robert de Kerlech, baron du Chastel, avaient échappé au terrible massacre de Roscanou dont nous avons parlé ailleurs (septembre 1590)] (en Gouézec) qui n'avait pas plus de 15 à 16 ans, et qui s'amourachait de Kerservant au vu et au su de tout le monde. Coroarch n'ayant pas réussi dans une première tentative, et Kerservant s'étant retiré par la suite au château du Pont-l'Abbé, son ennemi réunit vingt cinq complices : la bande se présenta aux portes, sous figures de paysans chargés de bois, mais il se trouva qu'à ce moment Kerservant se promenait sur le pont et fut heurté par un de ces prétendus paysans qu'il voulut arrêter, et qui, ne sachant se contenir, tira au capitaine un coup de pistolet, qui ne fit que le blesser légèrement. Ce fut assez pour faire manquer l'entreprise : Le premier conjuré, celui qui avait tiré inconsidérément, fût tué dans un créneau par où il voulait se jeter à la douve ; un autre fut mis à rançon de deux ou trois cents écus ; quelques-uns même furent pendus. Kerservant s'empara de Coroarc'h qui, après un long séjour dans les prisons de Rennes, fut condamné à trois années de service au Roi. Nicolas de Talhoët eut trois femmes. La première, celle qui est désignée comme dame de la Coudraye en Tréméoc, s'appelait Béatrix de Launay. Elle avait été baptisée en grande pompe [Note : Registres des baptêmes, 1565-1570, f° 134 (Archives communales de Saint-Malo). On remarquera que dans l'acte baptistaire le père de Béatrix est appelé « Jacques ». C'est aussi sous ce prénom qu'il est désigné dans d'autres actes de la même époque] à la cathédrale de Saint-Malo le 8 septembre 1569. L'acte baptistaire fait connaître qu'elle était fille « de messire Jacques de Launay [Note : DE LAUNAY D'argent au chevron engreslé de sable], capitaine et lieutenant pour le roy nostre sire en ceste ville de Saint-Malo, et de dame Guillemette Bauld, sa compaigne, sieur et dame de Tallevert : [Note : Les Launay étaient aussi seigneurs de Guerngelin, en Languidic, de Pontsal, en Plougoumelen, de Bézidel, en Brech, de Keronic, en Pluvigner]. Elle avait eu pour parrain Révérend Père en Dieu monseigneur monsieur Charles d'Espinay, évesque de Dol, et fut principale commère Béatrix de Jonchères, dame de Châteauneuff ». M. de Launay commandait en l'absence et au nom de Georges de Bueil, seigneur de Bouillé, capitaine de cinquante hommes d'armes, lieutenant général pour le roi en Bretagne, et gouverneur de Saint-Malo : celui-ci avait épousé Louise de Launay, nièce de son lieutenant. D'après les mémoires manuscrits de Frotet de la Landelle, Béatrix aurait été son unique héritière, de telle sorte qu'elle aurait réuni sur sa tête, avec la fortune de son père, celle de M. de Bouillé. Ce qui est certain, c'est qu'elle avait perdu ses parents bien avant sa majorité et qu'elle était fort riche. Honorat de Bueil, comte de Fontaines, neveu et successeur de l'ancien lieutenant général, jugea bon de conserver tous ses beaux biens dans sa maison et maria Béatrix de Launay, par contrat du 30 décembre 1585, à son second fils Georges de Bueil, seigneur de Bouillé, qui n'était encore qu'un enfant [Note : Dans ce contrat, c'est Honorat de Bueil, comte de Fontaines, qui stipule en son nom, comme s'il épousait lui-même Béatrix de Launay, ainsi que nous l'avons constaté nous-même à la bibliothèque nationale. Mais en réalité, il traitait pour son fils cadet. Le mariage de ce dernier avec l'héritière de Launay n'est pas contestable : dans son acte de sépulture, on lui donne un titre seigneurial qu'il ne pouvait tenir que de sa jeune femme : « monsieur de Talvert, fils de monsieur de Fontaines ». (Archives communales de Saint-Malo, registre des sépultures de 1588-1594, f° 7). Le comte de Fontaines n'était pas veuf en 1585, et sa femme, Anne de Bouillé, mère de ses trois enfants, lui a survécu : elle vivait encore en 1599, ayant perdu un fils aîné mort peu de temps après son père et n'ayant plus qu'une fille, Mme de Bellegarde, qui mourut sans enfants. Le comte de Fontaines avait un frère cadet, Louis de Bueil, seigneur de Racan, maréchal de camp, gouverneur du Croisic, dont le fils Honorat, marquis de Racan, est devenu un poète célèbre]. Sur les entrefaites, le jeune époux, âgé de quatorze ans au plus, mourut de la petite vérole, le 14 avril 1588, et sa veuve resta en tutelle chez le comte de Fontaines jusqu'à la mort de celui-ci, qui fut tué lors de la prise du Château par les Malouins, dans la nuit du 11 au 12 mars 1590. Six mois après, elle épousa Nicolas de Talhoët. Voici, à la date du dimanche 2 septembre 1590, l'énoncé de la troisième publication ; « Noble et puissant Nicolas de Talhouet, seigneur de Crémenec, des Bois, des Vaux, etc. et noble et puissante Béatrix de Launay, dame de Guergelin et de Pontsal, douairière de Bouillé » [Note : Archives communales de Saint-Malo, 1er registre des mariages, f° 82. Il est à noter que dans ce document Béatrix de Launay est qualifiée douairière de Bouillé, ce qui confirme le fait de son premier mariage avec le fils cadet d'Honorat de Bueil]. Par l'étendue nouvelle de ses biens, comme par le rôle qu'il avait joué dans la guerre civile, et les distinctions données en récompense par le Roi, Nicolas de Talhoët devint l'un des seigneurs les plus considérables du pays. Dès l'année 1604, il a le titre de capitaine du ban et de l'arrière-ban de la noblesse de Cornouailles, et il le portait encore en 1624. Le nom de la seconde femme manque ici, mais la troisième a une étrange histoire ; elle s'appelait MARGUERITE DE LA RIVIÈRE, fille de François, seigneur de Champlemy, lieutenant général pour le Roi en Nivernais, capitaine de 50 hommes d'armes, chevalier de l'ordre du Roi et gentilhomme de sa chambre, et d'Anne de Vettegen. Mariée à M. de Kerservant, fort âgé et valétudinaire elle fit bientôt déclarer le mariage nul par l'official de Vannes, et convola en secondes noces avec Nicolas de Talhoët, propre fils de M. de Kerservant et de Béatrix de Launay. Aussi peu heureux que le premier, ce mariage fut encore déclaré nul par sentence contradictoire de l'official d'Angers, après qu'un rescrit de la cour de Rome, en date du 31 janvier 1630, eut permis aux parties de se remarier. Une longue procédure à ce sujet durait encore en septembre 1638, et se termina par la confirmation de la sentence de dissolution, et quelques années plus tard, les deux époux se remarièrent chacun de son côté. Marguerite de la Rivière épousa, en 1645, à l'église Saint-Eustache de Paris, M. de Mailly, de la branche de l'Espine, qui fut assassiné à Doullens. La légitimité du fils qu'elle en avait eu fut longtemps contestée par la maison de Mailly [Note : Tout l'article Béatrix de Launay, avec ses notes correspondantes, est dû à l'érudition inépuisable de monsieur F. Saulnier, conseiller la Cour d'appel de Rennes, qui a bien voulu nous le communiquer. Ce qui concerne Nicolas de Talhoët est en grande partie pris dans la généalogie de Talhoët]. Des trois femmes de M. de Kerservant, Béatrix de Launay seule lui donna un fils et une fille. La seigneurie du Dréortz et celle de Paule, toutes deux si longtemps unies, se séparent à Nicolas II de Talhoët qui donna cette dernière en partage à sa soeur, le 20 octobre 1604. Nous reportons donc en note finale (Note finale) la suite des seigneurs du Dréortz, et nous continuons celle des seigneurs de Paule.

 MARIE DE TALHOET, fille de Jean de Talhoët-Kerservant et de Françoise Le Scanff, fut partagée par son frère, NICOLAS DE TALHOET, et reçut de lui, le 20 octobre 1604, pour sa part les terres de Grandbois, Brécilien et Paule, et autres héritages. Elle avait épousé messire JACQUES DU GOURVINEC, seigneur du Bézit (en Saint-Nolff), fils de Guy du Gourvinec, seigneur du Bézit, et d'Isabeau de Callac. Elle fut partagée avant l'année 1502, suivant l'acte suivant des archives de la seigneurie de Paule : « Comme ainsin soict que par acte du second de janvier 1602, porté par la cour de Hennebond entre messire Nicolas de Talhoët, seigneur de Kerservant, de Crémenec, du Dréorz, etc., d'une part, et messire Jacques dit Gourvinec et damoiselle Marie de Talhoët, sa femme, sr. et dame du Bezit, etc., le dit sr. de Kerservant auroit baillé en partage à la dite Marie de Talhoët, sa soeur, pour son droict naturel et légitime portion ès successions paternelle et maternelle de deffunct messire Jean de Talhoët et dame Françoise Le Scanff, leurs père et mère communs, à la raison d'un tiers pour le paternel, et une neuffiesme partie seulement de la maternelle ; pour ce que le dit seigneur de Kerservant auroit succédé collatéralement à deffuntz Marc et Claude de Talhoët, leurs frères germains, décédez après la dite le Scanff, leur mère et leur dict père ». Marie de Talhoët mourut en 1631, et la seigneurie de Paule advint à son fils aîné qui suit.

 

Armorie le Scaff seigneur du Dréor

 

La seigneurie du Dréors était une juveigneurie de Guémené, fondée en faveur d'un cadet des Beaumetz. Elle jouissait des droits de haute, moyenne et basse justice. Les armes du Dréors étaient celles de Beaumetz : «  de sable à la croix engreslée d'argent ». Dès avant 1362, la famille de Beaumetz était fondue dans celle des Le Scanff, la lignée mâle s'étant éteinte.

Croix engrelée : Se dit des croix munies de petites dents dont les côtés s'arrondissent

  Ètymologie sur le Dréors : sans informations (juste une mention « château éponyme » pour la seigneurie du Dréortz à Paule.

 
Collection de photos du château du Dréors à partir de 1900  

 

 

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Procureur-fiscal de la juridiction du Dreors

La justice seigneuriale a une importance primordiale au sein du village. Elle arbitre d'une part les conflits entre paysans, et d'autre part entre ceux-là et le seigneur. Dans ce dernier cas, elle n'est compétente qu'en matière de droits seigneuriaux, car pour toute autre cause, le seigneur doit se pourvoir devant une justice autre que la sienne.

 À l'origine, le seigneur peut ainsi asseoir sa domination sur ses terres, mais cette possibilité n'a plus guère de réalité à partir du xvie siècle, alors que le pouvoir royal restreint peu à peu les prérogatives seigneuriales. À la fin de l'Ancien Régime, la justice seigneuriale correspond plutôt à ce que l'on appellerait de nos jours une « justice de proximité », mais elle n'a plus alors d'importance réelle que pour des affaires mineures. En dépit d'une légende noire persistante, les justices seigneuriales, aux xviie et xviiie siècles, rendent des services indiscutables dans les campagnes car elles sont rapides, accessibles aux justiciables, peu coûteuses et équitables, selon l'opinion de la plupart des spécialistes modernes qui se sont penchés sur leurs archives.

Historique et évolution

La justice seigneuriale est issue de la féodalité et se caractérise par une délégation du pouvoir royal aux seigneurs, le roi étant juridiquement la source de toute justice (une justice qu'au xiiie siècle Louis IX rend encore personnellement à l'occasion pour ses propres domaines). La justice seigneuriale, moins lente et donc moins coûteuse que la justice royale, géographiquement plus proche des justiciables, permet également la diffusion des ordonnances et édits royaux au niveau local, ainsi que l’application des redevances seigneuriales (cens, banalités, droits de mutation, champart, saisine). Les seigneurs ont aussi un rôle de police administrative concernant les poids et mesures, la voirie, le contrôle des prix, les marchés, le fermage, les droits de passage. La possession de la justice constituant un important élément de prestige, les seigneurs n’hésitent pas à planter des poteaux de justice armoriés, qui permettent de marquer les limites territoriales de la seigneurie.

 Jusqu'au XVIe siècle, la cour seigneuriale est présidée par le seigneur, ou l’un de ses représentants : prévôt, bailli, sénéchal ou simple juge. Le seigneur ne juge plus personnellement depuis le XVIe siècle. Il est alors tenu de nommer un juge possédant des compétences juridiques reconnues (diplôme d'une faculté de droit), être pourvu de gages suffisants, et avoir été agréé par la juridiction royale dont il dépend.

 La Révolution française de 1789 supprime les justices seigneuriales et leur substitue les justices de paix (loi des 16 et 24 août 1790) qui fonctionneront dans chaque chef-lieu de canton jusqu'en 1958.

 Les trois niveaux de justice seigneuriale

On distingue trois degrés de justice seigneuriale, évoqué dans divers textes (par ex. la Coutume de Saintonge, dans le Sud-Ouest, en 15202) :

-          Justice haute (ou haute justice, Hochgericht en allemand)

Le seigneur (ou plus exactement le juge seigneurial) peut juger toutes les affaires et prononcer toutes les peines, dont la peine capitale (d'où le nom de jus gladii, litt. « droit de l'épée »), celle-ci ne pouvant toutefois être exécutée qu'après confirmation par des juges royaux (appel obligatoire, porté devant les parlements). La haute justice jouit de la plénitude de juridiction au civil comme au pénal.

-          Justice moyenne (ou moyenne justice)

Le seigneur peut juger les rixes, injures et vols. Les délits ne peuvent être punis de mort. Pratiquement, la moyenne justice joue un rôle important au civil, notamment en matière de successions et de protection juridique des intérêts des mineurs : apposition de scellés, inventaire des biens des mineurs, nomination des tuteurs, etc.

-          Justice basse (ou basse justice)

Le seigneur peut juger les affaires relatives aux droits dus au seigneur, cens, rentes, exhibitions de contrats et héritages sur son domaine. Il s'occupe aussi des délits et amendes de faibles valeurs (dégâts des bêtes, injures, amendes inférieures à 7 sols 6 deniers). Il doit posséder sergent et prison afin d'y enfermer tout délinquant avant de le mener au haut justicier. Si la seigneurie est assez grande pour qu'il y ait des vavasseurs, les affaires de moyenne et basse justice sont jugées par leurs soins.

 Le tribunal seigneurial se compose, théoriquement, de trois personnes :

-          le juge, appelé parfois prévôt, bailli, sénéchal, vice-gérant, ou viguier selon les régions, qui prononce la sentence.

-          le procureur fiscal, qui représente le ministère public et engage les poursuites.

-          le greffier, qui transcrit les jugements et tient les archives de la justice.

 Nota : le fond documentaire est disponible aux archives départementales du Morbihan.